Les mystères des Blues: A la poursuite de Grand Austral. [Solo]

Le second équipage de la division sudiste de la Marine avait accosté sur les rives du Royaume de Briss un peu plus tôt. Sur place, le Lieutenant Reb rencontra le Cardinal Jeroahaz, guide du "Culte". Ce dernier informa les forces armées que deux navires battant pavillon noir avait repris la mer il y avait déjà deux jours. Sans aucune information supplémentaire, l'équipage a décidé de lancer une traque hasardeuse. Ils furent bientôt contactés par la Base de South Blue qui leur indiqua que deux navires avaient fait escale sur une petite île.

En mer.

Ca y est, on les tenait ces enfoirés ! Si vous suivez depuis le début, j'avais oublié de demander à quoi ressemblaient exactement les navires qu'on cherchait au Cardinal et l'Commandant avait bien la rage. C'qu'est un peu lourd quand le Commandos a la rage c'est que l'moral de l'équipage a la rage aussi et reste caché dans son coin. Bref, c'la merde, tout le monde est sous tension et personne ouvre sa gueule. Vous m'connaissez, dix minutes sans vanne c'dix minutes de perdues, alors j'avais aussi la rage. Mais bon, not' bonne étoile du Sud a décidé de nous sourire et a aiguillé notre route.

***

Dans les quartiers du Commandant. Le Lieutenant Jo' Reb, second de l'équipage et le Lieutenant Jimmy Spencer, ou "Gipsy", furent convoqués. Le Commandant observait avec attention la carte des eaux environnantes et feuilletait ce qui s'apparentait à un inventaire avec un poil de légèreté. A l'arrivée de ses deux lieutenants il esquissa un grand sourire.

-*Messieurs ! Il semblerait que nous soyons de retour à la base pour demain, après-demain grand maximum. L'un des deux vaisseaux que nous cherchons a percuté un récif et est privé de gouvernail, selon les sources locales. Nous leur tombons dessus dans environ deux heures.*

Gispsy s'occuperait d'organiser les hommes tandis que moi j'rejoignais la vigie et Oscar, le bleu qui me secondait. Oscar il était sympa mais clairement pas doué. J'crois que l'avais jamais vu toucher une seule cible depuis qu'il était dans la Marine, j'vous jure ! Autant vous dire que son rôle se résumait à regarder l'horizon pendant que moi j'descendais notre stock de Johnny Shooter et lui balançais des blagues. Il rigolait souvent mais j'ai jamais vraiment su si il captait vraiment c'que j'lui racontais. Qu'est-ce v'voulez qu'j'vous dise... On a aussi notre lot d'débiles dans l'sud !

***

-Commandant ! J'vais m'répéter mais on a un den den truc relié à celui du Commandant à la vigie. *Je t'écoute, Reb.* J'vois une île mais pas d'navire, chef ! Le Commandant a pas répondu tout de suite, sans doute qu'il râlait. J'pense qu'il a contacté les gars de l'île sur les fréquences courtes. En tout cas il a pas mis trente ans à me répondre. *Ok, on change de cap, ils ont plié bagages y a un peu moins d'une heure.* Mouais, si notre échange s'était résumé à ça, ç'aurait été un peu nul. Vous savez, à la vigie on est les yeux du bateau, on r'garde toujours c'qui s'passe, Oscar, surtout. *Lieut'nant !* Là il m'a tapé sur l'épaule. J'ai sué. Oh ! Commandant ! Le truc c'était une putain d'muraille, j'vous jure. *Je sais, ils ont sans doute eu vent qu'on venait pour eux. On va les choper avant qu'ils entrent dans la tempête.* Eux j'les voyais, là-dessus on est d'accord, mais PUTAIN LA TEMPÊTE ! MAIS C'EST QU'Z'Y VONT, LES CONS !!

L'espoir fait vivre. Jo' n'est pas météorologiste pour un sou, aussi laissez le narrateur éclairer vos lanternes. Cette "muraille" sombre à laquelle faisaient face les deux bâtiments pirates était certes assez impressionnante, précisons qu'elle bouchait totalement l'horizon, mais elle n'abritait pas vraiment de tempête, elle en était seulement le prémisse grandiloquent. Sans doute les pirates bluffaient la Marine en espérant que le Commandant des traqueurs soit aussi peu expert que son lieutenant de vigie.

***

-Bvvvlblbvv... En plus on s'les pelait grave dans c'te brume. On voyait rien, f'sait froid, les souvenirs de la grosse castagne d'y avait deux ans remontaient tranquillement. Commandant ? Moi j'vois plus rien, hein. *Regarde les voiles, Jo'. La formation de la tempête n'offre qu'un seul cap, si ils dévient on les attrape plus vite.* Il était vraiment pas con c'Commandant. D'autant que not' bon vieux bateau sudiste leur mettait la branlée niveau vitesse, avec leurs pirogues, là. *Ouvre quand même l’œil.*

Profiter des vents qui formaient la tempête était en effet une stratégie digne des plus grands navigateurs, bien que tous s'accorderaient à dire que de toutes les approches, elle était l'une des plus dangereuses, surtout quand on prenait en compte l'énormité de la tempête qui s'annonçait. Tempête qui, mais ça l'équipage ne pouvait pas le savoir, grossissait de minute en minute comme mue par ces forces surnaturelles qui peuplent les mers.

Vous connaissez l'expression "Le calme avant la tempête ?". Bah on était en plein dedans sauf que nos voiles étaient gonflées d'culot et nous amenaient droit dedans. Ah, ça, ça tirait bien, c'est sûr, on avait jamais été aussi rapides, j'vous l'confirme. Partout où j'regardais c'était gris. Devant ? Gris. Derrière ? Gris. Bâbord ? Gris. Tribord ? Gris. Mon uniforme ? Gris. Mouhahahaha, vous l'aviez pas... WOW !!

-*Le tonnerre, Lieutenant ?* Ah, et quand Oscar l'ouvrait il disait que des trucs cons du genre. On venait d'entendre un putain de gros grondement, et tout bon marin qui se respecte, surtout quand il chasse DEUX bateaux armés, sait que dans la brume, quand t'entends un bruit comme ça, faut fermer sa gueule et prier pendant environ une vingtaine de secondes. Soit on venait de se prendre deux rafales par les deux bateaux en même temps, soit c'était bien l'tonnerre. Vingt secondes plus tard, aucun objet non-identifié n'avait percuté not' navire. Et puis à la distance du bruit on pouvait s'dire que si les gonzes nous avaient canardé, ils nous auraient pas touché. *Reb ?* Rien du tout, Commandant. J'avais pas vu un seul éclair ni aucune explosion. Un autre grondement. Là j'ai sué de nouveau. J'vous jure que le bateau a tremblé. Toujours rien vu, mais j'avais les poils bien hérissés. On s'faisait tous dessus. Un troisième. Toujours aussi fort. Un Quatrième suivi d'autres plus petits. Oh putain j'pissais d'la goutte. Une petite dose de whisky pour m'remonter le moral.

La vitesse du vaisseau de la Marine semblait se rapprocher de la racine du grondement, mais sans doute était-ce là l'imagination de l'équipage qui aurait juré à cet instant que l'un des plus ignobles monstres de l'océan venait à leur rencontre. Quelques minutes s'écoulèrent après la dernière série de grondements. La brume s'était faite plus épaisse, plus écrasante, Jo' apercevait à peine la proue de son propre navire. Puis, les Marines firent leur entrée dans le théâtre infernale d...

-MOUHAHAHAHAHA !! J'étais mort de rire. Ces cons s'étaient foutus sur la gueule. S'étaient bien charcutés, en plus ! Y en avait partout ! Du débris, d'la flamme, du cadavre, tout ! Les gars et moi on a bien rigolé, même le Commandant. Ahlala, vraiment des bourrins ces pirates. *Cherchez-moi quand même un survivant, les gars !* J'ai encore plus rigolé. J'allais tellement m'foutre de sa gueule si j'en trouvais un ! Là ! J'en vois un ! Pas l'aire futé, par contre ! Z'auriez vu la dégaine du type ! Même les révolmoches n'en voudraient pas ! C'Mendy qui l'a ram'né.

J'suis descendu pour l'occasion, j'allais pas manquer un moment comme ça ! Pour rien au monde ! On aurait dit un genre de souris avec des yeux un peu plus gros. Le mec était terrifié ! Sans parce qu'il nous voyait en vrai, d'ailleurs. On était tous attroupé autour de sa sale carcasse quand le Commandant et sa voix virile ont gueulé.

-*Laissez-le !* Là il s'est accroupi pour lui gueuler sur la face. Le pauvre était encore plus blanc. *Raconte ! Et dépêche-toi !* Ouais parce qu'en plus Mendy a faim ! Tout l'monde a pété d'rire et Mendy a croisé les bras en envoyant un baiser avec ses grosses lèvres vers le rescapé. La suite était encore plus fendard. *Je...jejeje... On nous a attaqué ! Un... un un bateau camouflé dans la brume !* Serious shit, tous nos sourcils se sont froncés comme un seul. Si ce goyo déconnait pas, on n'était pas serein. *Quel bateeaaau !* La rage du Commandant, qui ne lui ressemblait pas, faisait encore plus peur que les grondements. Mais visiblement, le lascar avait peur d'autre chose. *Lui ! Forcément, oui ! C'était lui !* Me demandez pas, j'ai pas compris. *MAIS QUI LUI ?!* Le mec a ouvert ses yeux comme si il venait de voir ma bite. *Lui ! Le Grand Austral !*

Excédé par la supposée moquerie de son prisonnier, le Commandant ordonna à un équipage obnubilé qu'on le mette au cachot. Une confusion silencieuse gangrenait les esprits. Les plus anciens s'en allaient à leurs fantasmes d'effroi tandis que les "bleus", eux, cherchaient leurs aînés du regard. Bougez-vous ! Le Commandant lui-même ne savait pas vraiment que penser. Après un bref regard lancé autour de lui, il déclara d'une colère inquiète. Trop longtemps qu'on traîne dans l'coin.

On s'est remis en route mais j'suis resté sur le pont. Mendy, moi et d'autres bleus on avait formé un cercle autour du vieux Necket, le doyen et cuisinier. Bon, Mendy et moi on voulait surtout s'foutre de la gueule des nouveaux.

-Le Grand Austral... ? Laissez-moi vous raconter c'que j'sais du Grand Austral, les bleus.

On avait donné l'ordre de plier les voiles, le temps était à la réflexion, une réflexion qui devrait vite trouver conclusion au vu de la tempête qui s'annonçait. Parti en cale pour interroger le rescapé de l'incident ayant mené les deux vaisseaux pirates à leur perte, le Commandant laissa les plus jeunes de ses hommes à la merci des paroles du sergent Necket, cuisinier du navire.

-On dit qu'ça fait plus d'cinq siècles que Grand Austral écume les mers sudistes et coule les navires sans distinction. Y en a qui disent que c'est l'fantôme de Sam Wyatt et les restes de ses joyeux loubards qui hantent le navire, mais... Necket avait l'art de conter les histoires. Ses yeux se plissèrent et il tira une longue et puissante bouffée sur sa pipe usée. Nous dans l'Sud on sait tous que ça c'est la version pour les enfants et les ignorants. Il pointa l'une des recrues. Toi ! T'sais qui c'est l'père Wyatt ? Un hochement craintif et négatif de la tête. Aaaah mon garçon ! Wyatt ! Tout le monde devrait connaître Sam Wyatt, par chez nous ! Enfin bref... Laissez-moi rattraper l'boulot d'vos catins d'mères bande de bousins. Il se gratta la tête. Y a longtemps, comme maintenant, tout l'monde montrait sa queue pour prouver qu'il avait la plus grosse. Mais Wyatt, lui, il voulait plus qu'une grosse, il voulait la meilleure. Un vrai p'tit gars d'chez nous l'bougrin. M'enfin... se trouve qu'un jour Wyatt et ses saloperies d'sudistes sont allés faire les larrons dans l'Nouveau Monde. C'était la première fois qu'les connards d'Grand Line voyaient débarquer des authentiques soûlards de South Blue, la première fois qu'des bottes du pays f'saient trembler leur "Route de tous les périls", comme si y avait plus périlleux qu'une taverne sudiste au beau milieu d'la nuit. Rire général. Au début, les lascars de Wyatt faisaient c'qu'savaient faire, c't'à dire pas grand chose... Mais le père Sam, lui il était pas con ! Savait bien qu'y avait des fesses qui claquaient chez les gros bonnets du Nouveau Monde. Un jour, ce con-là a déclaré la guerre à tout l'monde ! Les pirates, la Marine, le Gouvernement, les p'tits, les grands, West Blue, North Blue, East Blue, bref ! Tout l'monde. Une petite pause. Bah croyez-le ou non, le père Wyatt il était tellement craint que tout c'beau monde y a j'té une malédiction, putain. Le genre de malédiction des océans qu'on voit que dans les livres pour gamins, v'voyez. Ces enfoirés avaient tellement peur du sudiste qui z'y ont maudit son navire ! Et depuis, le père Wyatt et ses soiffards sont condamnés à naviguer sans fin sur la Mer du Néant. D'temps en temps ils sont autorisés à revenir sur la mer de leur jeunesse à la seule condition qu'ils coulent tous les navires qu'ils croisent. Un haussement de sourcil. On dit qu'la Mer du Néant c'est pire que les pires tourments d'l'enfer. Ca leur fait pas d'mal de revoir un peu l'pays, j'pense.

Whaaa... 'tain c'était tellement décevant ! D'habitude Necket peut te tenir trois heures -et j'ai compté !- à t'raconter une histoire à dormir debout et pile quand il a l'occasion d'faire faire dans leurs frocs aux bleus il allonge pas la salive ! *Reb ! Spencer ! Necket ! Mendy ! Wallace ! Au carré ! Et tout de suite !*

En général, quand le Commandant convoque deux lieutenants et trois sergents au carré des officiers c'est qu'il a un genre de plan important. Que j'vous explique: Nous les lieutenants on est des sortes de relais d'autorité, c't'à dire qu'on donne des ordres calés sur les directives du Commandant. Les sergents c'est nos interlocuteurs, c'est eux qui s'occupent de la discipline et qui font régner l'ordre. Après t'as les caporaux. Eux ils ont deux-trois première et deuxième classes à charge, c'est un peu la dernière ramification de la hiérarchie. Techniquement, le carré des officiers est réservé aux... officiers, mais comme on est une famille, les sergents sont admis. Typiquement, dans le premier équipage, z'avez l'Commodore, un Commandant, trois lieutenants, un aspirant et toute une bardée de sous-officiers. Mais j'm'égare.

Dans not' équipage, tous les gradés sont pas les mêmes. J'm'explique: Necket était Commandant y a genre 20 ans mais il a demandé à être rétrogradé pour faire la popote tranquillement et déblatérer des conneries aux jeunes sans trop se soucier. Wallace, bah il a jamais voulu passer lieutenant parce que Wallace, les gars, c'est l'pire, c't'un bon gros chauve carré plus fort que toi qui t'mène à la baguette. Aucun bleu regarde Wallace dans les yeux. Mendy vous l'connaissez. Spencer, c'est le type cool, on est arrivé en même temps lui, Mendy et moi, c'est lui qu'a remplacé Falstein. Tout ça pour dire que si les caporaux étaient pas d'la partie c'est que l'intégrité toute entière était en jeu.

-*Bon. Voici ce que j'ai réussi à tirer du prisonnier avec Wallace: Les pirates ont bien essayé de nous perdre dans la tempête en pariant sur notre frilosité* rire étouffé de la part des officiers et sous-officiers *après avoir réparé leur gouvernail. Ensuite...* C'Wallace qu'pris la suite, Wallace il aimait bien raconter. *Naviguaient côte à côte, ces cons-là. Z'auraient aperçu un bâtiment dans la brume puis après ils savent plus trop. S'sont retrouvés avec un genre de mastodonte entre eux qui les a implosé en deux volées. L'aut' dit qu'c't'à cause de Dieu et du Cardinal, j'ai pas trop compris.*

Le Commandant nous regardait. J'aimais pas quand il faisait ça ! Ca voulait dire qu'il attendait qu'on l'ouvre pour nous remballer. Vous m'connaissez, j'l'ai ouverte.

-Et l'Grand Austral, on peut l'prendre, v'pensez ? Wallace à commencé à se gratter le menton pour réfléchir. Il aimait bien tout prendre très au sérieux. Mendy a ouvert de grands yeux vers Necket qu'a failli faire une syncope. Spencer a fermé sa gueule, comme d'habitude. *Justement... Vous oubliez cette histoire de Grand Austral, je n'ai pas besoin que l'équipage se sente observé par des fantômes ou je ne sais quoi. La tempête va être suffisamment forte pour que toutes nos forces se concentrent sur le navire.* Voilà pourquoi les caporaux étaient pas convoqués. Ces débiles auraient tout de suite ouvert leurs grands claques merdes pour foutre les jetons aux bleus. N'empêchait qu'une grosse tempête ça voulait dire qu'on y resterait pour un certain temps. Ouais mais Commandant, ça veut dire qu'ils se seraient vraiment mis sur la gueule pour rien ? *Oui, ou un incendie au niveau des réserves de poudre.* Mouais, ça coïnciderait avec les explosions...

***

-*Alors, Lieutenant ? C'est le Grand Austral ?* Ah p'tain c'est vrai qu'Oscar avait toujours des questions merdiques. D'ailleurs il disait que d'la merde, c'est simple. J'me répète mais le gonze était tellement redondant... Bouhahaha, j'déconne, j'l'adorais mon p'tit Oscar ! Le Seigneur de South Blue ! Ouaip ! Quand j'ai vu sa gueule j'ai tout de suite capté qu'valait mieux retirer la blague. Nan, j'plaisante, Oscar. Ces merdeux s'sont foutus sur la gueule pour une histoire de maille, à tous les coups. R'garde plutôt devant.

Ce qui devait arriver, arriva, une fois de plus. La tempête se déclencha avant que les manœuvres de l'équipage ne garantissent au bateau une bonne situation par rapport aux puissants vents qui soufflaient désormais. D'ailleurs, tempête n'était pas vraiment le mot, "cyclone" aurait été plus adapté.

Mais d'où ! Comment ?! Ça existe pas des trucs comme ça ! On voulait nous la mettre à l'envers, c'est sûr ! Jamais tu t'retrouves en plein milieu d'un ouragan en formation ! Jamais c'était un ouragan ! RHAAAAAAA !! Oh et puis fallait voir l'état du bateau. Ça gerbait, ça tombait, ça s'faisait d'ssus. Un vrai merdier. C'était plus du vent qui nous bougeait, c'était des putains tornades en rafales, le bordel. Les vagues, j'en parle pas. J'avais jamais vu ça. Et pourtant, bah on t'nait plutôt bien. J'aurais bien aimé l'voir le Grand Austral, tiens ! HA ! Faut dire qu'on était tous à peu près habitués. Ça faisait longtemps qu'on servait dans la Marine, pour certains. Mais chaque grosse tempête est unique, c't'un peu toujours différent. Celle-ci c'était le genre à te plonger dans le gros enfer de tes morts mais elle était pas hyper vicieuse. Alors ouais elle te tournait l'bide et tu voyais pas l'jour, ah, et ça faisait genre deux jours qu'on y était, mais elle te faisait pas le coup des sales vagues dégueulasses qui t'brisaient la coque en moins de deux. Après coup, j'ai crû comprendre qu'on avait surtout été chanceux et que l'Commandant avait bien joué son coup.

En effet, le Commandant n'en n'était pas à son premier cyclone, bien que cela fut la première fois qu'il y navigua aussi longuement. Sa tactique de navigation était simple: Dans un marasme électromagnétique où tous les outils sont confus et sous un ciel de tout temps noirci par les lourds nuages, seul le vent pourrait le guider. Or, les tempêtes du genre, si un cap rotatif est maintenu, ont tendance à expulser les navires hors de leur sillage. Ainsi, la logique voulait que nos marins possèdent un espoir certain de sortir vivants de cette aventure. Malheureusement, cela faisait déjà deux jours que le second équipage sudiste était perdu en pleine tempête, tant et si bien que le Commandant, seul compétent en la matière, se demandait si le cyclone avait une fin.

En cours...