William Stacy Rackham

Taille : 157 centimètres.
Poids : 45 kilogrammes.
Cheveux : Roux.
Yeux : Verts.




William s'habille souvent de la même manière. Il n'est pas rare de le voir porter un simple t-shirt et un bermuda, variant les coloris et les motifs. Pour compléter sa tenue de parfait plagiste, l'adolescent chausse une paire de tongs, ou d'autres styles de sandales, lorsqu'il ne se balade pas pieds nus.

Un masque chirurgical immaculé est attaché en permanence derrière ses oreilles. Il ne le met pas toujours devant son visage, mais le laisse le plus souvent sous son menton. Le voyageur préfère le garder plutôt comme un accessoire de mode que pour sa véritable utilité.

Sa longue veste blanche est en réalité une blouse médicale un peu trop large pour lui. William l'a récupéré dans les anciennes tenues de travail de sa grand-mère.



En connaissant un minimum William, il n'est pas difficile de dire que la plupart de ses objectifs sont motivés par la simple force de sa curiosité. L'adolescent souhaiterait tout connaître du monde qui l'entoure et résoudre les mystères de ce mystérieux univers. Comme beaucoup avant lui, le rouquin a décidé de prendre la mer pour partir à la découverte de contrées qui lui sont inconnues et rencontrer tout un tas de personnes différentes.

En voyageant, il espère aussi rencontrer des gens plus jeunes que les retraités qu'il a connus et avec lesquels il partagerait des centres d'intérêt commun. Depuis sa tendre enfance, le garnement n'a pas eu l'occasion de se faire beaucoup d'amis, mais il n'en reste pas moins une personne sociable qui s'intéresse aux autres.

Depuis qu'il a découvert les capacités de son fruit du démon, Will nourrit l'ambition de les étudier. L'adolescent aimerait écrire une encyclopédie à leur sujet, un grand livre dans lequel il recenserait tous les fruits et leurs capacités. Pour cette raison et même s'il évite d'en parler, il recherche des gens comme lui qui possèdent les pouvoirs d'un démon des océans.

L'apparition du Duc et de ses fameuses missives a fait naître en William l'envie d'obtenir de plus amples informations sur le siècle oublié. Au cours de ses vagabondages, il espère secrètement découvrir l'identité de ce mystérieux personnage à l'origine de la vague révolutionnaire qui fait trembler le gouvernement mondial.




Lorsqu'il était plus jeune, William considérait le gouvernement mondial comme un garant de la paix dans ce vaste monde. Il voyait les soldats de la marine comme des héros défendant les opprimés face aux bandits de la pire espèce. Enfant, il rêvait de rejoindre les rangs de l'armée afin de protéger les peuples et voguer sur l'océan.

Son opinion changea progressivement lorsque Kyros devint l'un des sept grands corsaires. Petit à petit, William commença à douter de la justice établie par le gouvernement mondial. Depuis l'apparition des lettres du mystérieux Duc, il n'a plus aucune confiance dans cette institution et s'en méfie.

L'adolescent estime que si le gouvernement est un usurpateur, les règles établies sous son autorité n'ont plus aucune raison d'être. Il a donc pris la décision de vivre selon ses propres principes sans se soucier de l'autorité de la marine ou des dragons célestes. William n'éprouve plus autant d'admiration pour les héros de son enfance que par le passé et cherche actuellement de nouveaux modèles à suivre.



William ne connaît des pirates que ce qu'il a pu entendre à leur sujet puisqu'il n'a jamais eu l'occasion d'en rencontrer. Lorsqu'il était plus jeune et que ses grands-parents lui contaient des histoires pour l'endormir, les forbans étaient bien souvent les méchants. Ils pillaient les villes, ils coulaient les navires après les avoir délestés de leurs cargaisons.

La mort de sa mère, causée par des pirates hommes-poissons, lui fit comprendre que la menace de ces criminels des océans était réelle. Suite à ce traumatisme, les forbans peuplaient ses cauchemars de petit garçon et troublaient son sommeil. William a longuement été effrayé par la possibilité que des pirates s'en prennent à sa ville natale, au reste de sa famille et à lui.

En vieillissant, il a pourtant compris que les pirates pouvaient être différents et qu'ils n'étaient pas forcément tous des barbares assoiffés de sang. Certains parmi eux hissaient le drapeau noir pour se libérer des chaînes du mensonge forgées par le gouvernement mondial et vivre de nombreuses aventures à travers les océans.



L'apprenti scientifique ne possède que très peu d'informations sur les francs-marins, mais la réputation de leur leader et certains de leurs actes sont parvenus jusqu'à ses oreilles. On peut dire que William voue une certaine admiration à Scarface, car celui-ci a humilié Kyros. Il n'adhère pourtant pas à la cause de la franc-marinerie.

L'adolescent pense qu'on ne peut appliquer une utopie de liberté par la violence et les bombardements. Selon lui, les francs-marins sont des criminels eux-mêmes dirigés par un ancien pirate au passé trouble. Il ignore si le groupe cherche véritablement à rétablir les vérités évoquées dans les missives du Duc ou si ses membres désirent renverser le gouvernement dans le but de le remplacer.

William a vu le jour durant l'année 1403 sur une petite île tranquille de West Blue, au sein d'un village méconnu entouré de montagnes et d'une immense forêt. Sa mère, Margaret, étudiante à Ohara, avait décidé de rejoindre ses parents afin qu'ils l'aident à vivre sa grossesse. Ce fut la grand-mère du petit, ancien médecin au service de la marine, qui le mit au monde. Anne et Archibald, les grands-parents, décidèrent de prendre en charge le nourrisson pendant que leur fille poursuivait ses études d'archéologie.

Le bambin grandissait aux côtés de sa cousine Mary, son aînée de sept ans. À eux deux, ils représentaient la seule population en bas âge de l'île. La plupart des habitants du coin étaient des retraités, mis au rebut des rangs de la marine pour manque d'efficacité dû à leurs âges avancés. De temps à autre, les familles leur rendaient visite, mais ces moments étaient plutôt rares. William ne put donc se faire de véritables amis de son âge.

Au départ Mary et William jouaient principalement dans le village, ils rendaient service aux habitants et se distrayaient comme ils le pouvaient. Parfois, ils assistaient aux parties de cartes organisées par Archibald. Le petit garçon restait toutefois un spectateur trop turbulent, voire trop envahissant, pour qu'on lui permette de rester. Par chance, Anne parvenait à canaliser l'énergie du garnement à travers ses leçons et ses histoires sur le monde.

Parfois sa mère lui rendait visite, elle voyageait énormément et lui apportait des cadeaux à chacun de ses retours. Le garçon rayonnait de joie lorsqu'il voyait Margaret, mais il la considérait plus comme une grande-sœur. Ses grands-parents faisaient office de figures parentales depuis longtemps. Ils étaient ceux qui le nourrissaient, qui l'élevaient et qui prennaient soin de lui. Les deux adultes vieillissants devenaient des modèles à ses yeux et seul leur semblant d'autorité comptait.


Le soleil se levait sur l'île, encouragé par le chant du coq dans la bassecour. Les habitants de la maisonnée s'éveillaient doucement tandis qu'une odeur de café emplissait les différentes pièces du rez-de-chaussée. Une femme, coiffée d'un chignon et vêtue d'une robe de chambre, s'affairait déjà aux fourneaux. En haut, des pas lourds et maladroits firent craquer le plancher de bois tandis qu'en bas, le son de la chasse d'eau indiquait qu'Archibald terminait son caca du matin. Le bougre possédait toujours un transit aussi réglé qu'une horloge et sa femme le jalousait un peu. Le bruit d'une chaise que l'on traînait sur le carrelage tira Anne de ses pensées. Elle se retourna pour poser son regard sur une adolescente svelte, à la longue chevelure blonde pas encore peignée. La grand-mère toisait sévèrement sa petite fille tout en remontant ses lunettes.

- Combien de fois je t'ai demandé de la soulever ta chaise ? Elle n'est pas si lourde que ça !

La demoiselle marmonna quelque chose qui ressemblait plus à un grognement qu'à de véritables paroles. La femme en robe de chambre déposa un bol sur la table, qu'elle remplit aussitôt de lait chaud.

- Ton cousin est réveillé ?

- La porte de sa chambre est ouverte, je pensais qu'il était déjà en bas.

Archibald traînait ses pantoufles dans la cuisine, s'attirant les foudres de son épouse qui le gratifia d'un coup de cuillère en bois derrière les oreilles.

- Ouille ! Aïe !

Il mentait. Archie était tellement habitué à ce genre de traitement qu'il s'y était accoutumé. Il réagissait plutôt par réflexe, pour éviter une nouvelle attaque sournoise. Il s'installa tranquillement dans son fauteuil, attendant patiemment son journal pour avoir quelques nouvelles du monde tout en sirotant sa chicorée.

- Il est bien matinal ce petit.
- Et discret, contrairement aux deux pachydermes qui vivent aussi dans cette maison !

Personne ne réagit à la remarque. Malgré ses quatorze ans, l'adolescente se savait plutôt jolie et son poids était tout à fait normal. Autre chose la préoccupait.

- Encore une fois, ça ne choque personne qu'un gamin d'à peine sept ans commence à errer dehors alors que le soleil vient à peine de se lever ?
- Je ne vois pas le problème, un bon bol d'air frais et une promenade de santé n'ont jamais fait de mal à personne.
- Ça m'évite de sortir pour récupérer mon journal, il me le rapporte toujours. Le martin facteur s'obstine à le lâcher dans la cour.

Les grands-parents répondirent en même temps, mais l'adolescente y était habituée. Cela faisait bien longtemps qu'elle avait abandonné l'idée de les voir prendre leurs responsabilités et faire preuve d'un peu plus d'autorité envers son cousin. Elle n'en restait pas moins dépitée par le laxisme qu'ils affichaient tous les deux.

- Papi, c'est un gamin pas un chien !

Selon elle, ils étaient totalement inconscients. William se montrait parfois trop aventureux. Depuis peu, il s'aventurait seul dans la forêt, risquant de rencontrer de féroces bêtes sauvages. Le petit garçon pénétra alors dans la maisonnée. Il portait un panier qui contenait des étrons et un journal.

- Salut !

Il tendit le magazine à Archie avant de déposer fièrement sa corbeille sur la table du petit-déjeuner. Mary se leva aussitôt en regardant son cousin avec de gros yeux.

- T'es vraiment obligé de mettre tes merdes sur la table pendant que je mange ?
- Détrompe-toi, petite idiote, William vient de nous ramener de bons champignons. Tu as trouvé ça où ?
- Euh... moi... je ne mange pas ça hein !
- Il y en a encore plein dans la forêt !

Le petit rouquin était particulièrement content. Il souriait tout en s'installant sur son siège. William prit un morceau de brioche et se l'enfonça direct dans le gosier. Cette petite promenade avait stimulé son appétit.

- Je suis fière de toi !

Anne ébouriffa la chevelure de son petit-fils avant de lui servir un bol de lait chocolaté. Elle entama ensuite la vaisselle. Plus tard dans la matinée, son mari et elle reçurent des invités pour leur partie de cartes quotidienne. Mary écœurée prit la direction de la salle de bains. Archie était plongé dans les nouvelles du jour, il suffisait de l'entendre râler pour s'en rendre compte. William avait rapidement terminé son petit-déjeuner et se dirigeait maintenant vers sa chambre. Il montait les marches d'un pas léger tout en sifflotant. Il passa les heures suivantes à remplir son cahier d'écriture, s'exerçant à cet art encore obscur pour lui. Un tintement aigu indiqua alors qu'un visiteur attendait à la porte. Comme d'habitude, il s'agissait de l'ancien commodore Balloon. Le vieillard avait beau être sénile, il demeurait ponctuel en toute circonstance.

La propriétaire de la maison se donnait souvent du mal pour accueillir ses invités. Elle couvrait la table d'une gigantesque nappe rouge qui traînait sur le carrelage. Des tisanes fumantes et des douceurs aux pruneaux n'attendaient qu'à être dégustées. Les convives arrivèrent tranquillement, saluant les organisateurs de la partie du jour avant de prendre place autour de la table.

- Archie, t'as vu un peu cette histoire ?
- Oui, on peut dire que Scarface fait parler de lui...
- Ma main à couper qu'il deviendra empereur un jour !
- Je suis bien plus inquiet par ce combat entre cette fameuse Tomoe et l'amirale Corleone.

Aotsuki était réputée et l'évocation de son nom mettait tout le monde d'accord. Archie, lui aussi avait succombé aux charmes de la demoiselle. En plus d'être belle, Julietta Corleone avait la réputation d'être une tireuse d'élite. Elle avait vraiment tout pour plaire. Caché dans l'escalier William écoutait attentivement les conversations des adultes, comme il le faisait à chaque fois.


La vie du gamin était plutôt simple, mais très peu de choses se passaient au sein de sa terre natale. Une fois par an et malgré une charge importante de travail, le commodore Kaho rendait visite à son prédécesseur. Sa présence mettait un peu d'animation dans le village et était bien souvent prétexte à une dégustations des alcools distillés par les retraités. William aimait assister à ce genre de festivités, mais elles restaient bien trop rares à son goût. Sa mère ne lui rendait plus visite, son dernier passage remontait à plusieurs mois déjà. Margaret voguait à présent en direction du Nouveau Monde.

Pour se distraire, le petit garçon s'aventurait dans la forêt, sans pour autant trop s'éloigner du village. Il lui arrivait parfois d'observer les étranges lézards éléphants. On nommait ces créatures ainsi à cause de leurs grandes oreilles membraneuses qui leur permettaient de planer au dessus des courants aériens. De temps à autre, il escaladait les arbres pour rejoindre leurs cimes et observer son environnement. Sa soif de découverte et sa curiosité le forcèrent à s'enfoncer plus profondément dans les bois. La présence de dangereuses bêtes sauvages l'empêchait toutefois de fouiller chaque recoin de l'île.

Malheureusement, le temps de l'insouciance touchait à sa fin. William était âgé de neuf ans lorsqu'il dut faire face à une terrible nouvelle. Ses grands-parents avaient reçu une lettre qui les informait que le navire sur lequel voyageait leur fille avait été attaqué par les Sea Prinz. D'après la rumeur, personne n'avait réussi à échapper à la barbarie des hommes-poissons et tous les passagers avaient péri. Le petit garçon était peiné, mais il réagissait plutôt par mimétisme face à la tristesse de ses grands-parents. Il prit tout de même conscience que le monde était rempli de dangers.


Les rayons de l'astre solaire peinaient à traverser l'épaisse brume qui entourait l'île. Le coq semblait tout aussi paresseux que le soleil. William était déjà installé sur un siège, attendant patiemment le réveil de ce bon vieil Archie et de Mary. Anne s'occupait encore de la préparation du petit-déjeuner. Cette matinée de printemps était spéciale pour la petite famille. Aujourd'hui c'était l'anniversaire du petit dernier, le premier depuis le décès présumé de sa mère. Cette année, William fêtait ses neuf ans et Margaret ne serait pas à ses côtés. Lorsqu'elle y pensait, sa grand-mère ne pouvait s'empêcher d'avoir de la peine. Des monstres avaient fauché la vie de sa fille bien trop tôt. Tandis qu'elle vérifiait la pâtisserie dans le four, Anne essuya les larmes qui roulaient le long de ses joues.

Archibald sortait des toilettes pour s'installer dans son fauteuil. Mary mettait bien trop de temps à descendre au goût du petit garçon. Will n'avait pas eu la patience d'attendre et s'était précipité au premier étage pour pénétrer dans l'antre de sa cousine. La blonde dormait encore et il ne put s'empêcher d'attraper un coussin pour lui donner un coup sur la tête. Il se montrait plutôt rude et le réveil de l'adolescente ne fut pas des plus agréables. Mary commença à hurler, enragée, mais le jeune garçon s'en moquait totalement.

- Dépêche-toi ! Mon gâteau est prêt ! La boîte attend sur la table !

Il se précipita au rez-de-chaussée, s'installant de nouveau sur sa chaise. Il trépignait d'impatience et s'agitait. La demoiselle rejoignit le reste de la famille, descendant les marches mollement et d'un pas lourd. Elle arriva enfin et s'installa sur son siège, affichant une expression de mauvaise humeur. Pourtant, les sourcils froncés et la mine basse de sa cousine ne gâchèrent en rien la joie de William. Il n'attendit pas l'approbation de ses grands-parents et ouvrit la boîte pour observer son gâteau.

- Il est un peu bizarre, non ?

La pâtisserie ressemblait à un fruit peu commun. Elle était blanchâtre et vert bleuté. Des motifs en spirale parsemaient sa surface en relief. Malgré son apparence peu commune, elle n'avait pas l'air mauvaise.

- C'est un cadeau de ta mère, elle a jugé bon de...
- Pouah ! Mais c'est dégueulasse !

Il venait d'en prendre une bouchée. Le gâteau avait un goût infect. William eut l'impression de goûter aux cendres du tabac de l'ancien commodore Balloon. Archibald et Anne le regardèrent d'un air surpris, les yeux ronds et la bouche grande ouverte. Ils restaient bloqués ainsi pendant quelques secondes. Will ne put s'empêcher de les fixer du regard, l'air hébété. Il ne comprenait pas vraiment.

- Bah quoi ? C'était pas pour moi ?
- Ton gâteau est encore dans le four...

Mary pointa la porte du four du bout de l'index. La pâtisserie s'y trouvait encore.

- C'était un cadeau de ta mère. Elle comptait le vendre pour que tu puisses faire tes études à Ohara, comme elle.
- C'était un fruit du démon.
- C'était pas mon gâteau ?

Le petit rouquin restait dans l'incompréhension la plus totale. Il ignorait tout des fruits du démon et de leurs pouvoirs. Archie et Anne quant à eux éprouvaient quelques difficultés à accepter la mauvaise nouvelle. Leur petit fils venait de détruire son avenir en une bouchée. Un simple petit morceau qui coûtait une bonne centaine de millions de Berrys. Dans la boîte se trouvait aussi un bout de papier auquel Will ne porta aucun intérêt.

- Qu'il est con !

Archibald n'avait pu retenir un juron et son épouse ne put s'empêcher de lui donner un coup derrière la tête. Pour eux, surtout pour Anne, la situation paraissait tragique. Les deux retraités possédaient quelques informations sur les différents fruits du démon. Ils conféraient des capacités à ceux qui les consommaient. Une terrible malédiction pesait sur ceux qui osaient y goûter et ils devenaient incapables de nager.


Il fallut un petit moment d'adaptation à toute la famille pour apprendre à vivre avec une personne maudite. William avait bien failli se noyer dans la baignoire à plusieurs reprises. Le pauvre petit coulait comme une pierre chaque fois qu'il plongeait dans l'eau. Pour cette raison, il abandonna totalement l'idée de se laver. Toute sa famille devait subir sa mauvaise odeur et même les habitants du village commençaient à le fuir. Il s'aventurait de plus en plus dans la forêt et les montagnes, passant parfois des nuits entières à l'extérieur malgré les dangers. Archibald et Anne se montraient de plus en plus permissifs, laissant le garnement vivre sa vie comme il l'entendait. Will tentait de se familiariser avec ses nouvelles capacités.

Il lui arrivait parfois de créer une étrange petite brume en éternuant, mais il n'y parvenait pas volontairement. L'enfant rentrait presque toujours couvert d'écorchures et de boue. Il se battait souvent avec de gros ratons laveurs. Ces animaux n'étaient pas bien dangereux, mais ils défendaient farouchement leur territoire. Le rouquin ne pouvait éviter chaque coup de griffes et chaque morsure. Malgré la douleur, il n'abandonnait jamais son exploration de l'île et continuait d'avancer. L'enfant nourrissait l'ambition de voir la limite de son petit monde tout en découvrant ses propres limites.

Au fil du temps, le garnement comprenait ses capacités. Il était capable de générer de petits nuages à partir de son propre corps. Cela ne semblait pas d'une grande utilité, mais il réussissait parfois à créer des nuages de pluie sous lesquels il se lavait sans crainte de se noyer. Parfois, le rouquin empruntait une barque et naviguait dans les petites rivières qui entouraient le village. Il essayait de surmonter sa récente peur de l'eau, se mettant parfois en danger en empruntant des rapides. William naviguait sans aucun véritable talent. Il n'était déjà pas très doué pour se repérer sur la terre ferme, mais il pouvait au moins laisser des traces de son passage afin de les suivre. Sur l'eau, la tâche se révélait bien plus compliquée et il se perdait.

Parfois, le garçon ne rentrait pas durant plusieurs jours. Son attitude intrépide forçait les retraités à effectuer des battues pour le retrouver. Un peu facétieux, Will faisait parfois semblant d'être perdu, jugeant qu'un peu d'exercices maintenaient les vieillards et sa cousine en forme. Il espérait aussi faire oublier aux anciens de la marine les mauvaises nouvelles à propos des lettres d'un certain Duc, sujet principal de conversation des habitants du village en ces temps de trouble. Malheureusement pour lui, l'une de ses blagues se retourna contre lui lorsqu'il s'aventura dans la tanière d'une panthère tachetée. Il avait onze ans et ce jour-là, il était allé plus loin encore que par le passé. Une tempête l'avait surpris et il s'était réfugié dans une grotte. La malchance voulut que l'abri soit habité par un gros félin qui prit le rouquin pour son repas du jour. Lorsque la bête tenta de le croquer, William crut sa fin arrivée.

Un étrange phénomène se produisit et lui sauva la vie. Il avait réussi à créer un nuage chargé de foudre qui foudraya la pauvre bête sur place. Surpris, le rouquin prit ses jambes à son cou et brava la tempête pour rentrer. Plus jamais il ne refit de farces de ce genre, mais cela éveilla sa curiosité sur les fruits du démon.


C'était une belle matinée d'automne de l'année 1415. Dehors, la pluie tombait en trombes. Tout le monde avait déjà pris son petit-déjeuner et chacun s'occupait comme il le pouvait. Archibald était plongé dans son journal. Mary se trouvait dans sa chambre, chantant à tue-tête des airs d'un célèbre groupe de musiciens de Toroa. Anne ignorait totalement où traînait William. Une délicate odeur de coq au vin se propageait dans toutes les pièces de la maison. Archie adorait particulièrement ce plat et il profiterait ainsi de l'absence du coq pour dormir un peu plus longtemps. La porte menant vers l'extérieur s'ouvrit subitement, faisant sursauter le vieil homme. Le rouquin se précipita vers sa grand-mère en courant.

- Mamie, elles sont où tes affaires de travail ?

Anne le fixa un instant avant d'éclater de rire. Le gamin était nu comme un ver et tout trempé. Elle en oublia même de hurler parce qu'il avait mouillé son carrelage. Archibald ne put s'empêcher de rire lui aussi. Mary avait entendu les deux vieillards s'esclaffer, mais elle mettait cela sur le compte de la sénilité. Ses grands-parents n'étaient pourtant pas si vieux que ça.

- Qu'est-ce qui t'arrive encore ?
- J'ai décidé que je voulais devenir scientifique, je vais étudier les fruits du démon et faire une encyclopédie !

Le garnement ne manquait pas d'enthousiasme, même si elle avait du mal à l'imaginer faire de quelconques découvertes en restant dans cet endroit. Anne restait tout de même curieuse concernant les motivations du garçon.

- Pourquoi tant d'entrain ?
- J'ai réussi à faire quelque chose de formidable aujourd'hui !

Cette réponse suscita d'autant plus la curiosité de la retraitée, qui se demandait quel genre d'aventure avait encore bien pu vivre son petit fils. Le gamin lui en parlerait sûrement plus tard, mais pour l'heure il semblait particulièrement pressé. Il se dandinait devant Anne en tirant sur les manches de son gilet.

- Tu peux regarder dans les vieux cartons du grenier, tu devrais y trouver ton bonheur. Pense d'abord à te sécher !

Will montait déjà les escaliers en courant. Il passa rapidement dans la salle de bain, puis dans sa chambre avant de rejoindre les combles. Il fouilla un long moment, ne descendant que pour manger le plat préparé avec amour par sa grand-mère. Le rouquin fit ainsi l'acquisition de tout un stock de blouses et de masques chirurgicaux ainsi que du matériel scientifique utilisé par Anne lors de ses études. Il découvrit quelques anciens manuels de la marine dans les affaires de son grand-père.

- Cool !

Archie somnolait dans son fauteuil lorsque son petit fils s'exclama, le faisant sursauter à nouveau. Le garnement descendit les escaliers. Il portait une blouse sur le dos et un livre sous le bras et courut aussitôt dehors. Il ne pleuvait plus, mais le soleil peinait tout de même à traverser les gros nuages gris. Le gamin se percha sur un arbre, feuilletant les pages de son livre avec un air sérieux et concentré. Il étudia chaque paragraphe, s'intéressant aux différents types de fruits du démon. Le rouquin découvrit ainsi qu'il existait des fruits qui donnaient à ceux qui les mangeaient la capacité de se changer en un animal, cela l'impressionna énormément. Il sut d'office qu'il n'appartenait pas au type Zoan et poursuivit ses recherches.

Au fil de ses lectures, il conclut que son fruit était du genre Paramecia. Will ne parvenait pas à prendre la forme d'un élément naturel et se contentait d'une capacité de création et de manipulation. La nuit était presque tombée lorsqu'il décida de rentrer chez ses grands-parents. Il ouvrit la porte, doucement cette fois.

- Papi, mami, j'ai mangé un fruit de type Paramecia !

Le rouquin semblait tout fier de lui. Il bombait le torse en avant et adoptait une posture triomphante. Pourtant, aucune réaction ne vint l'encourager. Tout le monde s'en moquait totalement. Archibald ronflait et Anne s'endormait en lisant le journal. Apprendre que trois capitaines corsaires étaient morts en affrontant les francs-marins ne l'empêchait pas de trouver le sommeil. Un peu déçu, le petit garçon se dirigea vers sa chambre.

- T'as pas entendu quelque chose ?
- Hum... Non.


Au fil du temps, à force d'étudier ses capacités, William commença à maîtriser sa forme intangible. Il constatait aussi qu'il pouvait s'élever dans les airs et planer en profitant des vents, même si ses mouvements se révélaient encore trop hasardeux pour qu'il puisse s'orienter convenablement. Il parvenait néanmoins à en profiter pour amortir ses chutes et ne pas subir de dégâts lorsqu'il se faisait attaquer par les bêtes sauvages. Grâce aux pouvoirs conférés par son fruit du démon, le rouquin eut l'occasion d'explorer l'île. Pourtant, ses recherches n'avançaient pas vraiment. Tout ce qu'il savait se basait uniquement sur ses propres capacités.

Il passait de longs moments à observer l'océan depuis les falaises. Il s'allongeait parfois sur le sable de la crique, fixant les vagues avec l'envie de voir ce qu'il y avait au-delà des marées. Son monde devint bientôt trop petit et il rêvait d'explorer West Blue. Il s'imaginait bien sillonner les océans de cet univers qui, à ses yeux, paraissait s'étendre à l'infini. Le jeune adolescent évoqua plusieurs fois la possibilité de s'en aller, claquant parfois la porte de la maison familiale pour disparaître des semaines entières pour préparer son voyage. Il se dégonflait toujours au dernier moment, même lorsqu'il construisit son radeau et qu'il amassa des provisions.

D'une certaine manière, sur cette île il était un peu le maître de son environnement. Ce monde inconnu qui le fascinait l'effrayait tout autant. Les mois passèrent sans qu'il s'embarque dans cette aventure tant espérée. Il fallut attendre le passage d'un navire de marchandises pour qu'il se décide enfin à prendre le large. Sans rien dire à personne, William emporta la dernière lettre de sa mère ainsi que le papier qu'elle lui laissait. Selon elle, la feuille blanche pourrait le guider vers son père s'il se perdait en mer.

Le rouquin écrivit une lettre à sa famille, sur laquelle il nota simplement qu'il prenait la mer tout en s'excusant de ne pouvoir saluer ses grands-parents et sa cousine en face. William leur promettait aussi de revenir les voir un jour, lorsqu'il aurait accompli son but.


Cela faisait plusieurs jours que l'adolescent se cachait à bord du navire qui transportait des marchandises en direction de Toroa. En bon passager clandestin, Will se faisait particulièrement discret. Il avait rapidement épuisé ses provisions, mais ne put se servir dans la réserve du bateau. Le pauvre garçon se terrait comme un rat dans la cale, mais la faim et la soif l'obligèrent à s'aventurer dans les cuisines. Au-dehors, il entendait des hurlements et des bruits de boulets de canon et de bois qui craque. Tandis qu'il s'apprêtait à saisir une marmite remplie de poisson bouilli et de légumes, quelqu'un l'attrapa par le col.

- Il y en a encore un par ici !
- Lâche-moi !

William commençait à se débattre, mais un bon coup sur la tête l'assomma net. L'adolescent sombra dans l'inconscience, convaincu qu'il venait de se faire surprendre par un membre de l'équipage. L'apprenti scientifique revint à lui quelques minutes plus tard. Les rayons du soleil filtraient assez pour lui permettre de remarquer qu'il se trouvait dans ce qui semblait être une réserve de fruits et légumes. Des pastèques, des carottes et des melons trônaient dans des tonneaux. Mort de faim, le rouquin commença à manger jusqu'à s'en donner la nausée. Lorsque quelqu'un vint ouvrir la porte de sa cellule, il avait déjà presque terminé le stock de pastèques.

Will se trouvait dans une position qui ne lui permettait pas de se défendre. Seules ses jambes dépassaient du baril et il ne put réfréner un cri lorsqu'une personne lui posa la main sur les fesses.

- Tu veux un coup d'main ?
- Espèce de sale petit...

Il se débattit encore, l'un de ses pieds heurta la tête de l'homme qui tentait de l'attraper. Le garnement eut à peine le temps de sortir du tonneau que l'inconnu se rua sur lui. Ignorant tout de ce qui l'attendait, William joua la carte de la naïveté.

- Euh... Désolé. J'avais faim, je ne savais pas que j'avais pas le droit.

Le voleur se laissa finalement capturer, espérant qu'on ferait preuve de clémence à son égard. L'étranger en colère le traîna jusque sur le pont d'une main, tandis que l'autre était posée sur son nez duquel s'échappait un peu de sang. Il balança le gamin à ses collègues en s'exprimant sans que personne ne puisse comprendre ce qu'il disait. Un autre inconnu, un borgne, commença à l'observer sous tous les angles.

- Notre capitaine sera contente, on pourra tirer un bon prix de celui-là. Il a l'air jeune et en bonne santé.
- Tu parles de quoi là ?

Will semblait désarçonné. Il avait un peu de mal à comprendre la situation. Le navire sur lequel il se trouvait ne ressemblait en rien à celui sur lequel il avait embarqué.

- On est des trafiquants d'esclaves, petit ! On capture des gens pour les vendre aux riches de ce monde, tu saisis ? Les Dragons Célestes sont plutôt friands de ce genre de choses.

L'adolescent avait déjà entendu quelques histoires à ce sujet, mais il croyait qu'on les lui avait racontées pour l'effrayer. Pourtant, cette fois-ci il s'agissait bel et bien de la réalité. Un peu choqué, il gardait le silence en regardant un à un chaque bandit.

- La capitaine va nous donner une belle récompense. Bientôt tu te trouveras face à cette magnifique créature.

Le brigand tendait un avis de recherche sur lequel figurait la photo d'une créature qui semblait tout droit sortie de ses cauchemars. La femme avait une mâchoire carrée et le visage anguleux d'un homme. Ses yeux et sa bouche étaient bien trop petits par rapport à son gabarit. Le nez de cette horrible capitaine était pointu et disgracieux. Elle avait de longs cheveux blonds ondulés, coiffés en deux couettes nouées par des nœuds roses.

- C'est un travesti votre capitaine ? À en juger par sa musculature, il a l'air bien bâti quand même ! Il doit être fort...

L'équipage de pirates parut tantôt surpris tantôt horrifié. Heureusement pour lui qu'elle n'était pas là pour l'entendre. William éclata de rire.

- Rakakakaka ! Homme ou femme, ça reste très moche de toute façon.

L'un des brigands tenta de trancher l'adolescent en deux avec son sabre. Le garnement fit un bond, par réflexe. La lame faillit bien atteindre la chair, mais elle fendit le vide. Le pirate commençait déjà à se vanter, pensant avoir tué avec une grande facilité celui qui insultait leur capitaine. Ses comparses lui firent pourtant rapidement signe de se retourner. Le rouquin semblait flotter dans les airs. Il avait involontairement créé un nuage qui lui permit de s'élever dans les airs et d'éviter le coup fatal. L'adolescent profita de la surprise pour fondre sur son adversaire et le rouer de coups de poing et de coups de pieds.

L'équipage s'apprêtait à lui sauter dessus, mais le bateau fut agité de soubresauts. La mer s'agita soudainement, comme pour montrer sa désapprobation.

- Des baleines !

La vigie hurlait. William avait entendu dire que des Island Whales vivaient dans la région de West Blue et il s'agissait sûrement de ces mammifères marins. Chacun regagna son poste et l'apprenti scientifique en profita pour s'éclipser. Il rejoignit la réserve pour y voler de l'eau et des provisions avant de s'embarquer dans le canot de sauvetage. Même s'il ignorait tout de la navigation et que ses chances de survie étaient moindres, il préférait encore tenter ses chances en mer plutôt que devenir esclave ou rencontrer l'horrible capitaine de ces trafiquants d'esclaves.


Emporté par le courant à bord de son canot, William erra sur la mer un bon moment. Il ne pouvait dire depuis combien de temps il passa bercé par les courants océaniques et aériens. Son embarcation faillit se retourner à plusieurs reprises, mais il tint bon. La chance lui sourit par une nuit assez froide. L'adolescent aperçut une lumière au loin et décida de s'y diriger, attiré comme un papillon le serait sur une ampoule allumée. Cela ne l'empêcha pas d'éclater son navire sur le rivage rocheux de Phare West Blue. Il coula à pic, croyant bien sa dernière heure arrivée. Ses poumons se remplirent d'eau et bientôt il n'y eut plus que les ténèbres.

L'apprenti scientifique s'éveilla sur une plage. Une créature marine le fixait. Elle ressemblait à un mélange entre une vache et un poisson, ses écailles étaient blanches tachetées de marron et deux cornes surplombaient sa tête. Le rouquin se leva alors, tremblant de froid. Il fixa la bête avant de la saluer d'un grand signe de la main. Sans même s’en rendre compte, il l'avait remercié en pensant qu'elle était celle qui l'avait sauvé de la noyade. Will s'était ensuite éloigné de la plage pour prendre la direction d'une gigantesque tour rouge et blanche. Il lui fallut un petit temps de marche pour rejoindre sa destination.

Le rouquin dut encore monter une série de marches de pierre afin d'atteindre le sommet. Il était finalement arrivé en haut pour se retrouver nez à nez avec un vieillard barbu qui l'attendait, un revolver pointé dans sa direction. Il l'interrogea sur son identité et le garnement répondit aussi sec. Même s'il ignorait que le vieil homme était sourd, il parla fort afin que celui-ci puisse l'entendre. Il avait l'habitude d'être confronté à des personnes âgées et généralement elles n'entendaient plus grand-chose à partir d'un certain âge. Le vieil homme au chapeau le prit d'abord pour une ancienne connaissance qui s'appelait William aussi. Soit il avait des problèmes de mémoire, soit c'était sa vue qui était mauvaise. Les deux allaient parfois de pair avec la vieillesse.

Le rouquin lui fit toutefois remarquer qu'il n'était pas son ancien collègue qui lui rendait visite, mais un adolescent perdu. L'étranger à la chevelure grise l'invita alors à "foutre le camp", mais le garnement s'obstina et le vieux bourru accepta finalement de l'aider. Il lui servit un verre de lait. L'adolescent expliqua alors son périple et évoqua sa surprise d'avoir été sauvé par une vache des mers. Il fallut un certain temps à Will pour se rendre compte que les yeux de son interlocuteur étaient bandés et il en vint à se demander comment il pouvait être aussi précis. L'inconnu avait tout de même réussi à le viser avec son arme à feu sans être capable de le voir.

Pour le remercier de son accueil, mais surtout pour assouvir sa curiosité quant à son étrange capacité, William proposa de rester un peu pour l'aider dans son travail. Se faire rembarrer par le cow-boy ne l'empêcha pas de s'incruster. Il suivait parfois le vieil homme en cachette, mais se faisait repérer assez rapidement. L'adolescent découvrit néanmoins que l'inconnu s'occupait d'une ferme sans aucune aide. Ce vieux ne lui paraissait vraiment pas normal. Ce fut ainsi qu'il prit la décision de persister et de rester sur Phare West Blue jusqu'à découvrir le secret du fermier.