Récit de taille [ft Astrid]

Le voyage avait recommencé. Voguant sur les mers avec la détermination de milles hommes, Peace était reparti se battre pour ce qui le faisait réellement vibrer. Sa foi le guidait à travers les océans, l'avait emmené jusqu'à cette étrange petite compagnie de transport, l'avait fait changer de paysage. South Blue, la mer de tous les péchés, patrie de nombreux pirates et d'autant d'hérétiques. Les yeux posés sur le monde, Vittorio attendait. Il savait que le flot ininterrompu des vagues, aidé par la force d'Herza la Triste, le transportait vers ce qui devait forger son futur.

Terre en vue, la première escale s'imposait à lui. Un port luxueux et riche, pauvre et miséreux. Les mendiants côtoyaient les navires des commerçants, mais les mains tendues restaient toujours vides. Une vision si paradisiaque et si horrible à la fois, n'éveillait en l'oiseau de paix qu'un ressentiment de haine. Il avait l'impression de revenir pour la première fois au récif, où les pauvres vivaient aux côtés des bourgeois, le regard bas et la mine abattue. Méprisants, ces hommes tout de soie drapés, n'accordaient même pas un regard à ces âmes perdues, pas un seul geste. Les dames s'en écartaient même d'un discret pas de côté, hantées par la peur que leur pauvreté soit contagieuse.

Posant le pied au sol, son minuscule bateau amarré à une bitte si poussiéreuse qu’on eut pu douter qu’elle ait été utilisée un jour, Peace pose un regard froid, hargneux sur la population qui l’entoure. Défenseur de droit divin des opprimés, il ne saurait supporter une telle vision plus longtemps. Alors, quand quelques secondes plus tard, un homme attrape un quémandeur par le col et le pousse au sol pour se frayer un chemin, la colombe ne peut que réagir. D’un coup d’accélérateur, il démarre et attrape la gorge sublimée de bijoux de l’homme, avant de le planter contre le mur. Un craquement lourd suit le mouvement, et l’homme retombe par terre la nuque brisée, du sang s’écoulant de sa bouche.

- Foutu païen, le monde n’a plus besoin de toi. Tu aurais pu survivre mais ton arrogance t’as tué.

Un silence s’abat dans la foule, un vent de glace les parcourt, semblant paralyser tout le monde. Le temps se fige un instant, les regards vaquant faiblement entre le géant et sa victime. Puis un cri de femme, une explosion de hurlements et le port se vide en quelques instants. Seul face à ses actes, le prophète ne desserre pas les dents. Il sait parfaitement que la milice sera prévenue, que les défenses vont se resserrer sur lui comme un étau impuissant. Mais il ne bouge pas. Il prie, lentement, récitant dans sa tête les vers sacrés de Mirko, la foi et l’amitié, la protection et la lumière. Il prie, face au mur, dans la sérénité la plus solennelle et…

- POUAH ! Mais ça fouette!

…

A quoi bon s’acharner à vouloir rendre chacun des ses gestes épiques quand, à tout moment, il peut me lâcher une caisse au milieu du récit. La concentration, l’immobilité et l’odeur, voilà le mot qu’il manquait. Un bon gros pet vaseux en plein milieu d’un mouvement de panique. Mes amis, vous qui ne connaissiez pas encore notre héros, bienvenue.
Revenons à notre histoire. Car c’est à cet instant précis qu’elle redevient intéressante. En effet, une fois la place vidée de tous ses passants, ne restait plus en vue, dans un recoin qui ressemblait à une échoppe, qu’un stand de bois. Dessus, plusieurs humains, un homme, une femme, deux enfants et une jambe. La surprise se lisait sur le visage du messie en voyant cette énorme jambe dépourvue de pilosité. Il leva le regard, avec la peur d’y découvrir une chose affreuse et n’eut pour seul vision qu’une femme, d’une beauté toute particulière à laquelle, il va de soi, notre homme d’Eglise était insensible. Une femme, si grande qu’elle dépassait tous les bâtiments et qu’il soit assez peu vraisemblable de ne pas l’avoir remarquée plus tôt.

- BONJOUR! QUE FAITES-VOUS LA?