On the rock

 

Le soleil de la fin de journée, bas sur la ligne d’horizon, m’éblouit alors que je sortais tout juste du bureau de mon supérieur. Je n’y croyais toujours pas, je venais tout juste d’être nommé Capitaine. Adieu la servitude du grade de lieutenant. Bonjour aux responsabilités du grade de Capitaine. Franchement, je ne savais pas trop si j’y avais vraiment gagné au change.
Après tout, j’avais gagné en liberté, mais j’étais encore plus proche du sommet de la hiérarchie et donc je devais répondre à des ordres plus importants, plus dangereux et plus ‘’absolus’’.
Mais bon, pour le moment je m’en accommoderais.

Alors que je regardais l’horizon en me demandant si ma promotion était une bonne chose ou une mauvaise, on me sortit brutalement de mes pensées.

“Lieutenant Lazarus ! m’interpella un soldat. Vous êtes attendu dans la salle de liaison immédiatement. Il y a un appel pour vous de la part d’un capitaine.”

Un capitaine qui demandait à me parler ? C’était étrange. Quant à être interpellé de la sorte, c’est ce qui arrive lorsque l‘on n’a pas d’escargophone personnel. Il faudrait que j’y remédie d’ailleurs.

“Bien, j’arrive tout de suite. Lui répondis-je en commençant à marcher vers la salle de liaison. Oh et… C’est Capitaine Lazarus à présent.”

Cela me faisait une drôle de sensation de me faire appeler ainsi. J’étais fier, mais j’avais aussi l’impression de devenir snob. Mais peu importe, la marine obéit à une hiérarchie stricte et plus vite tout le monde sera au courant de mon changement de grade et plus vite les rouages de cette organisation tourneront dans un sens idéal.

“Félicitations pour votre montée en grade Capitaine ! Me dit le soldat. Avec un sourire. Vous devez être fier n’est-ce pas ?”

Il était encore jeune et ne devait pas encore comprendre tout ce que ce titre impliquait, mais il avait tout de même raison, j’étais fier. Cependant, en tant qu’officier, je devais donner des réponses encourageantes, afin de garder le moral de mes subalternes au plus haut. Du moins, c’est comme ça que je voyais la chose.

“Oui, je le suis. Répondis-je alors avec un sourire. Mais ma plus grande fierté c’est de faire partie de la marine. Toi aussi tu seras capitaine un jour. N’en doute pas. Il faut juste que tu croies en la justice.”

Je vous l’accorde, c’était une phrase toute faite que j’avais déjà entendue par le passé. Mais ça avait l’air d’avoir produit son effet. Le soldat marqua un temps d’arrêt avant de se mettre au garde à vous.

“Oui, capitaine, je le ferais ! me répondit-il, avant de retourner vaquer à ses occupations.”

J'atteignis bien vite la salle de liaison, ou un message m’attendait. Après l’avoir lu, je montais sur le premier navire à destination de North Blue.

 

C’est comme ça que j’ai atterri sur ce navire. J’étais sur le pont, affublé d’un manteau épais, afin de me réchauffer. Chacune de mes expirations produisait une quantité de buée devant moi. Nous étions au milieu d’un épais brouillard et l’air était bien plus froid que j’en avais l’habitude.
Franchement, je regrettais le climat de South Blue. Je ne comprenais même pas comment on pouvait vivre dans une région comme celle-ci.

Je me demandais comment le navigateur arrivait à savoir ou aller dans cette purée de pois. Encore une fois, je sortis de ma poche le message que j’avais reçu. Il s’agissait d’un message de Edward Warden. Un de mes collègues. Non, un ami plutôt. Nous avions déjà partagé notre lot d’aventure tous les deux, ainsi qu’une corvée de patate, ou nous avions fait connaissance.
Apparemment, Edward me demandait de l’aide. Il avait appris que quelque chose se préparait sur North Blue. Il n’en savait apparemment pas beaucoup plus, mais il voulait des renforts au cas où.
Il précisait aussi que si cela s’avérait être une erreur de sa part, alors ce serait des vacances à North Blue.
À la réception de ce message, des vacances à North Blue m’avaient paru être une bonne idée. À présent, je me disais que le climat de cette région me donnait envie de me mettre au chaud devant un plat mijoté ou un alcool très fort.
Même combattre par ce froid serait difficile et je me demandais ce qui m’attendait ici.

Lazare, mon singe de compagnie monta sur mon épaule, revenant d’une petite balade sur le pont. Je n’eus même pas le temps de le saluer qu’il se glissa à l'intérieur de mon manteau, bien au chaud.
J’espérais vraiment que toute la région n’était pas comme cela, car je commençais déjà à me sentir dégoûté de mon voyage.

Finalement, le brouillard finit par se dissiper et je pus enfin voir l’océan, ainsi qu’une île au loin. Vu le cap, ainsi que l’agitation sur le pont, c’est l’île où Edward et moi nous étions donnés rendez-vous.
J’allais enfin pouvoir revoir ce bon vieux Warden et lui demander ce qu’il lui avait pris de me faire venir dans un endroit aussi froid ! J’attendais de vraies explications !
Alors que je commençais à me réjouir, la vigie commença à hurler du haut de son perchoir.

“Iceberg, droit devant ! S’égosillait-il comme un fou.”

Je ne voyais pas vraiment en quoi cela pouvait être dangereux, un petit glaçon sur la mer. Mais un coup d’œil vers l’avant du navire me laissa bouche bée. Cet iceberg était immense, il faisait au moins la taille du navire et nous étions lancés à pleine vitesse vers lui.
Bon sang, je n’avais vraiment pas de chance lorsque je voyageais. Tout le monde se démena rapidement pour virer de bord et éviter l'amas de glace, mais c’était trop tard.
La glace ouvrit une grande brèche dans le flanc droit du navire, comme un couteau sur une feuille de papier. L’équipage affrétait déjà les barques afin de sauver leur vie et le capitaine s'assurer que tout le monde ait une place sur les canots de sauvetage.
Je m’approchais de lui.

“Capitaine, vous ne tentez pas de sauver votre navire ? demandais-je en me demandant si je pouvais faire quelque chose.”

“Inutile, tu as bien vu à quelle vitesse l’eau monte dans les cales. Me dit-il l’air dépité. C’est peine perdue !”

“Nous allons juste quitter le navire et attendre les secours alors ?”

“Oui, nous ne pouvons pas faire grand-chose de plus.”

C’était vraiment frustrant de ne rien pouvoir faire de plus, mais, le capitaine avait déjà pris sa décision. Rien ne pourrait plus sauver ce navire et je devais moi aussi le quitter.
Heureusement, le bateau avait plus de canots de sauvetage que d’équipage à bord, je pus donc trouver une barque, où je mis mon sac. Je la fis ensuite descendre à flot, ce qui n’était pas bien long puisque l’eau était déjà presque au niveau du pont.

Une fois dans ma barque, je mis mon bras mécanique dans l’eau et la fit tourner pour me propulser vers l’avant.
J’interpellais ensuite le capitaine du navire.

“Je pars vers l’île la plus proche, je vous enverrais de l’aide ! Restez en vie d’accord ?”

Sans attendre de réponses, je me mis à filer sur les flots, vers l’île où je devais rencontrer Edward. Je trouverais certainement de l’aide là-bas pour venir secourir les naufragés. Du moins, je l’espérais.