Aventure sur l’île du singe

 

Je ne mis pas longtemps à me proposer pour mettre pied à terre et chercher des vivres. J’avais hâte de me dégourdir les jambes et d’explorer cet endroit où je n’avais jamais mis les pieds.
À peine j’avais rejoint la barque qui devait m’amener avec d’autres soldats à terre, que le petit singe que j’avais trouvé plus tôt sauta sur mon épaule. Apparemment, lui aussi voulait mettre pied à terre. Ce n’était pas une mauvaise idée d’ailleurs. Il n’avait rien à faire sur un navire de la marine, je le laisserais peut-être sur cette île, si elle n’est pas trop dangereuse et qu’il s’y trouve de la nourriture à son goût.

Pour arriver plus vite sur la terre ferme, j’utilisais ma main mécanique comme hélice afin de faire avancer la barque.
J’avais eu cette idée alors que je regardais un petit moulin à vent, avec lequel un enfant jouait à Baterilla.
Je pourrais même mettre au point une façon efficace de m’en servir en combat, si je m’appliquais.

Nous ne mîmes pas longtemps à arriver sur l’île et à mettre pied à terre. J’aidais à tirer la petite embarcation sur la plage, histoire qu’elle ne se fasse pas entraîner au large.
Une fois sur le sable, l’île avait l’air bien plus grande que de loin. Mon esprit d’aventure s’éveilla et j’eus soudain une folle envie d’explorer le fin fond de cette forêt dense, qui s’étendait devant moi.

“Bon, je vous laisse. Lançais-je aux deux autres soldats venus avec moi. Je vais en direction de la montagne, je vous laisse la côte à explorer.”

“Bien lieutenant ! lançaient-ils alors tous les deux.”

“Pas de ça avec moi ! leur dis-je alors. Je suis en perme, pas besoin de vous prendre la tête.”

Je m’éloignais après ces quelques mots en levant une main pour les saluer. Je devais avoir l’air trop cool !
Comme je l’avais prévu, plus je m’avançais dans la jungle, plus il régnait une chaleur humide. J’avais bien fait de laisser ma veste sur le bateau et de ne garder que mon débardeur.
Après avoir regardé partout, de façon frénétique, le singe s’est calmé et a quitté mon épaule. Il sautait à présent de branche en branche, en me gardant à l’œil.
Impossible de savoir s’il voulait ainsi m’empêcher de partir sans lui ou s’il se méfiait encore de moi.
En tout cas, pour ma part, ça commençait à devenir vraiment difficile d’avancer. La végétation me barrait le passage. Je n’avais rien pour me taillader un chemin. J’aurais dû penser à prendre une machette ou quelque chose de ce genre. J’avais bien un petit couteau qui pouvait sortir de mon index. Mais ça ne me servirait à rien dans le cas présent.
J’arrivais tout de même, avec beaucoup d’effort à arracher quelques plantes avec la force de mon bras.

Plus j’avançais et plus j’avais une sensation étrange. La sensation d’être observé. J’avais, au début, mis ça sur le compte du singe qui me suivait partout. Mais il avait fini par revenir se reposer sur moi. Plus exactement, il avait fait en sorte de se bloquer dans mon foulard, pour pouvoir faire une petite sieste sans être inquiété.
Il y en avait au moins qui parvenait à garder leur calme dans toutes les situations.
Alors que j’avançais en regardant autour de moi, mon pied se bloqua dans une racine et je m'étalais en avant en plein sur un buisson d’épines.
Je me protégeais le visage avec les mains, afin de ne pas me faire crever un œil, tout en me débattant, pour sortir de là.
Alors que je pensais m’en être enfin extirpé, je tombais dans un ravin.
La chute me parut interminable et fût accompagner d’un très léger cri de panique.

“Aaaaaaaaaaaaaaaaah. Avais-je crié de toute ma voix.”

On avait dût m'entendre crier à travers toute la jungle. Peut-être pas jusqu'à la plage quand même, mais assez loin.
La pente était plutôt raide et je ne trouvais aucun moyen pour m’arrêter. J’étais totalement désorienté tellement je roulais sur le sol.
Ma chute fût finalement stoppée brutalement, par un arbre. Il me heurta, ou plutôt je me heurtais à lui, en plein sur mon flanc gauche. La douleur me transperça littéralement et j’en eus le souffle coupé pendant plusieurs dizaines de secondes.
Tout devint sombre autour de moi, ma vue se troublait et je perdais conscience. Même les cris du petit singe ne m'atteignaient pas. J’étais totalement hors de portée de ses appels frénétiques.
Je l’avais protégé dans ma chute, afin de ne pas l'écraser. J’espérais vraiment qu’il n’avait rien de cassé.

 

Lorsque j’ouvris les yeux, il m'était impossible de savoir combien de temps j’étais resté inconscient. Certainement un bout de temps, puisque le soleil commençait déjà sa chute derrière l’horizon.
La nuit était toute proche de s’installer et je me retrouvais au fond d’un ravin, génial ! Il fallait à tout pris que je me bouge d’ici. La nuit était plutôt dangereuse sur ce genre d’île inhabitée. Qui sait ce qui pouvait chasser dans cette jungle une fois la nuit tombée.

J’essayais donc de me relever et une douleur presque insoutenable m’envahit. Je grimaçais et porta ma main sous mon débardeur. Vu la grosseur au niveau de mes côtes, j’en avais au moins une de cassée. Ça n’allait pas être facile de sortir de là.
Je réessayais de me relever, malgré la douleur. J’y parvins cette fois et je commençais à suivre le ravin afin de voir jusqu’où il allait. Chaque pas me faisait horriblement mal, mais je devais au moins trouver un abri pour la nuit.

En suivant le ravin, qui descendait petit à petit, j’arrivais finalement à un petit point d’eau. Je me laissais tomber à genoux au-dessus de celui-ci, puis je goûtais l’eau avec méfiance. Finalement elle avait l’air clair et potable et je me mis donc à me désaltérer et me passer de l’eau sur le visage.
Ma gorge était complètement sèche. J’aurais dû emmener une gourde. Une gourde, une machette, j’avais vraiment besoin de pas mal de choses avant de partir à l’aventure.
Finalement, alors que je buvais, une étrange lueur dans l’eau attira mon attention. On aurait dit deux yeux qui me regardaient fixement. C’était vraiment étrange. Je me penchais donc un peu plus en avant pour voir de plus prêt.
J’eus juste le temps de faire un mouvement de recul avant qu’une énorme mâchoire ne sorte de l’eau et se referme en manquant de m’arracher la tête au passage. Il s’agissait d’une sorte de crocodile avec la tête allongée et plate.
Je reculais en me tenant le côté gauche et l’animal sortit de l’eau pour me poursuivre.
Il était encore plus étrange ainsi. Il ‘n’avait que deux pattes avant et une longue queue. Le tout aussi plat que sa gueule.
La créature tenta à nouveau de me croquer, mais j’esquivais de justesse avant de répliqué.

“Nä~ve : Stans ! lançais-je en lui assénant un coup de poing mécanique droit sur le sommet du crâne.”

Les dents de l’animal cédèrent sous mon coup, ainsi que les os de sa mâchoire. J’en avais peut-être un peu trop fait.
En tout cas, l’animal avait perdu connaissance. Je crois même qu’il était mort sur le coup. Je vérifiais et m'aperçu qu’il avait effectivement rendu son dernier souffle.
Je l’attrapais donc par la queue et décidais de m’éloigner d’ici avant qu’un autre arrive, encore plus gros. Avec le peu de chance que j’avais en ce moment, cela ne m’aurait même pas étonné.
Après une vingtaine de minutes de marche, en traînant le croco-bizarre derrière moi. Quoi ? vous avez un meilleur nom à proposer ? Non ? Alors ce sera Croco-bizarre pour le moment.
Donc, après une vingtaine de minutes de marche, j’arrivais finalement à une petite grotte. Ou plutôt un renfoncement à flanc de montagne.
Génial, ça voulait dire que je m’étais encore plus enfoncé dans cette satanée forêt ? C’était bien ma veine. J’espère au moins que j’arriverais à retourner jusqu’au navire avant qu’ils ne repartent pour la base M4.

Après un rapide coup d’oeil à cette grotte, afin de m'assurer qu’il n’y avait aucun danger, je déposais le croco-bizarre et je partais chercher du bois. Heureusement pour moi, les branches mortes, ce n’est pas ce qu’il manquait dans le coin. Je parvins donc à me faire un petit stock, qui devrait, d’après mes estimations, durer toute la nuit.
J’allumais un petit feu de camp, avec le chalumeau contenu dans mon annuaire. Puis je découpais la peau épaisse du Croco-bizarre. Il n’y avait pas beaucoup de viande, tellement sa peau était épaisse, mais je parvins quand même à me faire des brochettes de Croco-bizarre, en enfonçant sa chair sur des branches.

Je commençais à peine mon repas, lorsque le singe que j’avais rencontré sur le bateau arriva à mes côtés. Il m’inspecta sous toutes les coutures et souleva mon débardeur pour poser des plantes bizarres sur mes côtes.

“Aie, doucement, tu me fais mal ! lui dis-je en le repoussant doucement.”

Il me mima ensuite quelque chose. Il montrait ses côtes, faisait mine d’avoir mal, puis il posait une feuille dessus et semblait soupirer de bien-être.
Je fronçais les sourcils et interprétait ce qu’il tentait de me dire.

“Tu essaies de dire que, si je mets ça sur mes blessures, j’aurais moins mal ? lui demandais-je alors.”

Mais où avais-je la tête. Ce singe ne pouvait pas comprendre ce que je disais. Je soupirais, en me disant que je devais avoir perdu la boule. Puis il attira à nouveau mon attention en faisant des signes affirmatifs de la tête et en me tendant les feuilles qu’il m’avait apportées.
Il s’agissait d’un simple singe. Un modèle miniature en plus. Qu’est-ce qu’il pouvait bien connaître de la médecine ?
D’un autre côté, je n’avais pas grand-chose à perdre. Je décidais donc de lui faire confiance. Je faisais peut-être trop confiance aux personnes que je rencontrais. Et même aux animaux maintenant. Mais parfois, ça m’avait bien sorti du pétrin.

Je levais donc mon haut et en déchirais de larges bandes. Puis je posais les feuilles sur mon côté meurtri avant de serrer une bande autour de mon abdomen.
Une fois que ce fût fait, je montrais le résultat au singe, qui m’avait regardé faire sans bouger du début à la fin.

“Là, ça te va comme ça ? lui dis-je en pointant mon bandage de fortune du doigt.”

Pour toute réponse, il me fit un signe affirmatif de la tête, avec une expression de victoire sur son visage de macaque.

“On dirait que tu as décidé de rester avec moi. Lui demandais-je avec un sourire.”

Encore une fois, il me mima un petit ‘’oui’’ de la tête. Puis il me pointa du doigt et prit un petit morceau de bois, avant de rouler par terre en le protégeant.

“Tu veux rester avec moi, car je t’ai protégé ?”

Il me répondit à l’affirmatif encore une fois. J’éclatais alors de rire et il suivit le mouvement en riant avec moi. Rire me faisait très mal aux côtes, mais je venais de me faire un ami macaque. En plus, j’étais en pleine discussion avec lui, ce qui était plutôt risible quand on y pense.

“OK, je veux bien te garder avec moi, mais il va te falloir un nom. Lui dis-je avant de réfléchir. Que dis-tu de carpette ?”

Il me répondit en faisant un bruit de pet avec sa bouche et en me montrant ses fesses. J’en déduis donc qu’il n’appréciait pas vraiment ce nom.

“Bon d’accord. Louis ? Luffy ? Singe ? John Doe ? Dis-je alors qu’il répondait à chaque fois de façon plutôt négative. Que dirais-tu de Lazare ?”

Il pencha la tête sur le côté, l’air pensif. Puis il acquiesça en applaudissant. J’avais proposé cela un peu comme une blague, mais apparemment, il appréciait.
Je me mis à rire et il me suivit à nouveau dans mon éclat de rire.

“Clayton Lazarus et son fidèle compagnon, Lazare ! dis-je en riant toujours. On va faire des envieux. J’ai hâte de voir la tête de l’autre tigresse avec ses chats !”

Je posais ma tête contre la paroi de ma grotte et je remettais du bois dans le feu. Mon fou rire s’était à présent calmé et j’étais devenu pensif.
Il fallait que je rentre à la base, avant de pouvoir la faire visiter à mon nouveau compagnon à fourrure. Je commençais à douter que je remette un jour les pieds là-bas. Non, je ne devais pas douter. J’arriverais à sortir de cette forêt et à rejoindre le navire. J’y arriverais coûte que coûte.
Bercé par mes pensées positives, je plongeais dans un sommeil profond.

 

Lorsque je me réveillais le lendemain, le soleil caressait déjà mon visage et le feu n’était que braises fumantes. Il était encore tôt, mais il fallait que je retourne jusqu’au navire.
Je ne savais pas quand ils partiraient et j’avais vraiment peur qu’ils m’abandonnent à mon triste sort. Pire, ils pourraient me croire mort et ne pas chercher à me retrouver ou envoyer du secours.

Je me levais donc en serrant les dents, ne sachant pas si la douleur serait plus forte que la veille ou non.
Je fus surpris de constater que la douleur était plus supportable et que je pouvais même marcher sans avoir trop mal.
Était-ce grâce aux feuilles que le singe, enfin, Lazare, m’avait donné ? Je n’en savais rien, mais je fus surpris de ne pas le voir a mon réveil. Peut-être était-il parti faire un tour.

Après avoir recouvert mon feu de camp, je me mis en marche. Lazare saurait me retrouver s’il revenait ici. Il m’avait déjà prouvé qu’il était plein de ressources, après tout.
Le seul chemin qui me ramenait vers l’ouest en remontant le ravin était très escarpé. J’eus énormément de mal à trouver un chemin praticable. Une fois que ce fût fait, j’ai mis facilement une heure à grimper en haut.

Alors que je marchais dans la jungle à nouveau, j’entendis des cris. Cela ressemblait fort à ceux d’un singe. Le genre de cris qu’ils poussent lorsqu’ils sont en danger plus exactement.
Comme je pensais qu’il s’agissait peut-être de Lazare, je me mis à courir aussi vite que je le pouvais. Mon flanc me faisait à nouveau mal à cause de l’effort, mais je parvins quand même à temps au haut d’un petit surplomb.

De là où je me tenais, j’avais une vue imprenable sur ce qui ressemblait à un vieux temple abandonné. Il semblait habité par des singes de toutes les espèces et de toutes les tailles. La plupart d’entre eux étaient rassemblés autour d’un autel. Sur celui-ci se trouvait un singe ressemblant à Lazare. Non, après l’avoir mieux observé et avoir entendu ses cris, je n’eus aucun doute. Il s’agissait de lui. Il était attaché par des lianes qui avaient l’air assez solide, même vues d’ici.
Vu la scène, la façon dont le petit singe se débattait et la façon dont les autres macaques semblaient se balancer en cadence et chanter. Soit, ils étaient là pour assister à un concert, soit à un sacrifice humain. Enfin, plutôt un sacrifice simiesque pour le coup.

Sans vraiment réfléchir, je me mis à courir encore une fois, afin d’empêcher le meurtre de mon nouvel ami. Au bout de quelques minutes, j’arrivais près de l’autel et je bousculais les singes attroupés autour.
J’arrivais pile au bon moment, pour voir un grand Mandrill qui se tenait sur ses deux jambes. Il tenait au-dessus de Lazare un morceau de silex pointu, prêt à l’enfoncer dans sa poitrine.

“Nä~ve : Stans ! criais-je en collant mon poing mécanique dans le visage coloré du macaque, qui vola quelques mètres plus loin.”

Je décrochais ensuite Lazare et je posais sur mon épaule, avant de placer mon bras droit devant mon visage, bloquant ainsi le coup d’un gorille qui voulait en découdre. Son coup m’avait fait reculer et j’avais même failli perdre l’équilibre. Il n’avait pas dû utiliser toute sa puissance, sinon j’aurais certainement volé en arrière comme un fétu de paille.

“Je ne veux blesser personne, laissez-moi juste partir avec mon ami. Dis-je afin d’essayer de désamorcer le conflit.”

Apparemment, toute communication était impossible, puisque le gorille revenait à la charge. Cette fois-ci, j’évitais son coup et je contre-attaquais.

“Näve : Stans ! criais-je en tentant de lui coller un coup de poing droit au visage.”

Mais celui-ci bloqua avec ses deux bras puissants. Après quoi il attrapa mon bras pour essayer de le casser.

“Désolé, mais je ne peux pas te laisser faire ça ! Dis-je en poussant de toute mes forces pour poser ma main contre sa poitrine. Näve : Roterande Slag !”

Mon poing se mit à tourner sur lui même, commençant à percer directement dans la fourrure de mon adversaire simiesque.
Celui-ci lâcha alors mon bras sous la douleur et je m’avançais plus encore en ramenant mon bras vers moi, avant de le ramener en avant pour le percuter de plein fouet.

“Nä~ve : Roterande Slag ! criais-je encore en percutant le gorille, qui finit au sol avec un trou de chair arraché au milieu du torse.”

Sa blessure n’était pas très profonde, son cuir épais ayant beaucoup atténué les dégâts. Il survivrait, mais se rappellerait longtemps de notre affrontement.
À peine le gorille ait toucher le sol que d’autres singes venaient le remplacer.
Je me mis à nouveau en garde, mais le sol se mit à trembler légèrement et par accoups.
Les autres singes s’écartèrent pour laisser passer un énorme orang-outan. Celui-ci me dépassait en taille, alors que je faisais dans les deux mètres quinze.
Ses bras étaient monstrueux, quant à son torse, je vous laisse imaginer.
Il pointa Lazare du doigt, puis il porta ce doigt en travers de sa gorge, d’un geste qui valait tous les discours du monde.

“Je ne vous le laisserais pas ! C’est mon ami ! dis-je en fronçant les sourcils.”

Le singe frappa alors ses deux paumes de mains ensemble et l’impact me fit mal aux oreilles. J’eus un moment d'inattention et il en profita pour me charger. Il allongea son grand bras et tenta de me donner un coup de paume.
J'eus juste le temps de me protéger grâce à mon bras. Ce coup m’envoya tout de même voler contre l’une des rares colonnes encore debout dans ces ruines.
J’eus le souffle coupé lorsque mon dos cogna la pierre froide.

“Argh ! criais-je sans pouvoir m’en empêcher.”

Alors que tout semblait flou autour de moi, certainement à cause du choc. Mon adversaire ne me laissa aucun répit et fonça à nouveau sur moi.
J’évitais le coup de justesse et il détruisit la colonne se trouvant derrière moi sans problème. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il avait un sacré punch.
J’avais esquivé son coup par le bas, je profitais donc de ce moment pour me redresser de toute ma taille en brandissant mon poing vers le haut.

“Nä~ve : Stans ! criais-je en lui collant un uppercut droit à la mâchoire.”

Un adversaire normal aurait eu peu de chance de s’en relever, mais ce singe était tout, sauf normal. Il ne tomba même pas et se contenta de me regarder d’un air furibond.
Il levant ses deux bras bien au-dessus de sa tête en joignant ses deux mains. Il s’apprêtait certainement à m’écraser de tout son poids grâce à cette attaque.Je n’avais pas beaucoup de chance de replis. Il me fixait du regard et je savais que si j’esquivais à droite ou à gauche, il dévierait son attaque pour m’infliger tout de même un coup destructeur.

Je campais donc sur mes positions. Je plaçais mes jambes bien ancrées dans le sol et je positionnais mes deux bras au-dessus de ma tête, mon bras mécanique en première ligne.
Ce faisant, je le défiais du regard. Je le défiais de me faire plier avec son attaque.
Je me demandais vraiment si j’allais pouvoir résister. Nous le saurons bien assez tôt.

 

Finalement, la sentence tomba. L'orang-outan frappa de toutes ses forces, en utilisant son poids et la taille de ses bras à son avantage. Je gardais ma position et reçut le coup, sur mon bras mécanique.
Le professeur Green m’avait assuré qu’il était ultra résistant, je n’avais donc rien à craindre quant à sa résistance. Mes jambes et mon bras gauche par contre, étaient proches de leurs limites en recevant ce coup.
Mes genoux commençaient à fléchir et mes bras se rapprochaient dangereusement de ma tête. J’avais l’impression qu’à tout moment, mes jambes et mes bras pouvaient se briser.
L’impact en elle-même avait beau avoir duré un instant, j’avais l’impression qu’une éternité s’était déroulée.

Une fois que le grand singe retira son bras, mes jambes ne me portaient presque plus. Mon cœur battait la chamade et tout mon corps me faisait mal.
Je pense que mon entrainement intensif, pendant toutes ses années, avait porté ses fruits. Sans cela, je ne serais plus qu’une marionnette amorphe, écrasé contre le sol.
Je finis par me redresser, légèrement chancelant. Je plantais mon regard dans celui du géant et je le défiais du regard. Je le défiais de recevoir l’un de mes coups sans broncher.
On dirait qu’il avait compris, puisqu’il se mit en garde, protégeant son visage grâce à ses deux gigantesques mains. C’était à mon tour de frapper et je me promettais intérieurement qu’il le regretterait cette espèce de balourd.
Je reculais un peu, tout en regardant autour de moi. Les singes nous regardaient silencieusement. Je crois qu’ils ne comprenaient plus rien à la situation.
Certains avaient une lueur de peur bien perceptible dans le regard. Avaient-ils peur que je puisse gagner contre celui qui semblait être leur chef ? Leur roi peut-être. Qui sait si les singes vivent en monarchie ou non.
Je prenais Lazare dans ma main et je le posais sur le col.

“Attend moi là, j’arrive tout de suite. Lui dis-je en faisant craquer les jointures de ma main gauche.”

Je me fis craquer la nuque, m’étirais convenablement, afin de ne plus ressentir les effets du coup précédent. Puis je m’élançais, le plus rapidement possible vers le grand singe. Au dernier moment, je sautais sur ce qu’il restait de la colonne de pierre à côté de lui.
Toujours avec le même élan, je bondis en préparant mon coup, puis je frappais de toute mes forces.

“Nä~ve : Stans ! Criais-je à plein poumon en abattant mon poing dans ses horribles mains.”

J’avais utilisé toutes les forces qu’il me restait pour ce coup. J’y avais aussi mis tout mon cœur et toute mon âme.
Les doigts du géant se repliaient sur eux même, ses mains partaient en arrière et mon poing s'écrasait finalement contre son visage simiesque.
Suite à ce coup, l’orang-outan tomba en arrière brutalement, en tournoyant légèrement. Le combat était terminé, le géant était vaincu et la victoire était mienne.
J’espérais sincèrement qu’il n’y aurait pas de nouveaux challengers, car j’arrivais à peine à tenir debout. Mes genoux tremblaient sous mon poids et ma vue se troublait légèrement.

Autour de moi, les singes commençaient à crier en tapant des mains et en sautant partout. Je ne savais pas trop ce qu’il se passait, mais ils avaient l’air plus ou moins content de ma victoire. À moins qu’ils n’exprimassent ainsi leur mécontentement ?
Lazare revint finalement sur mon épaule et me fit un signe du pouce. Je fis de même avec un sourire.

“T’as vu ce que je lui ai mis a ce géant ? lui dis-je, la voix encore haletante.”

Il applaudit avec ses petites mains et je me mis à marcher vers la côte. Les singes s’écartaient sur mon passage. Puis l’un d’eux s’interposa et sembla dire quelque chose.
Sans que j’eut le temps de dire quoi que ce soit, Lazare lui répondit. S’en suivit un petit dialogue simiesque, auquel je ne comprenais strictement rien. Puis plusieurs singes vinrent nous encadrer et l’un d’eux prit ma main avant de montrer une direction.
Peut être était ce dut a la fatigue, mais je ne mis pas longtemps avant d’accepter de suivre les macaques. De plus, Lazare m’y encourageait visiblement et je lui faisais confiance.

C’est ainsi que je traversais la jungle sans encombre, escorté par cinq guides simiesques, qui me prévenaient chaque fois que je devais faire attention à quelque chose.
En à peine une heure, nous étions arrivés sur le rivage et le navire était en vue. Visiblement un autre navire de la marine, de plus grandes tailles, était venu nous porter assistance.
Une petite barque était encore sur le rivage, avec un homme qui attendait. Lorsqu’il me vit, il vint à ma rencontre.

“Lieutenant Lazarus, vous allez bien ? me dit-il en courant vers moi.”

Les singes qui m’avaient guidé à travers la jungle avaient déjà disparu. Dommage, j’aurais voulu les remercier. J'acquiesçais vers le matelot.

“Je vais bien, même si j’ai déjà connu mieux. lui dis-je en souriant”

Je commençais à m’avancer en boitant et il vint m’aider à marcher en passant mon bras gauche au-dessus de ses épaules.

“Le capitaine sera content. Me dit-il avec un sourire. Il a retardé notre départ jusqu’au coucher du soleil. Il ne voulait pas vous abandonner.”

“Le capitaine a fait ça ? répondis-je un peu surpris. Je le remercierais de sa bienveillance dans ce cas.”

Je m’assis finalement dans la barque et laissais le matelot ramer, ce qu’il fit immédiatement.

“Que vous est-il arrivé sur cette île ? me questionna-t-il une fois à mi-distance entre la plage et le navire de guerre.”

“Tellement de choses… Vous ne me croiriez pas, même si je vous le racontais. Lui dis-je en riant légèrement.”

Finalement, il ne me posa pas plus de questions. Le capitaine fût en effet content de me voir et ne m’obligea pas à lui faire un rapport sur mon aventure.
Cela n’empêchait pas les autres marins de me harceler afin de savoir. Je leur avais donc tout raconté, alors que nous étions tractés par l’autre navire de guerre.
Même le capitaine avait écouté mon récit. Je n’aurais peut-être pas dû en dire autant. Les membres de la marine peuvent être de vraies commères parfois. Je n’allais surement pas mettre longtemps à être appelé ‘’Clayton le Roi des singes’’ ou un truc comme ça.
Ah non, ce serait horrible ! il ne fallait pas que ça arrive ! Jamais !