Look around, look around.
How lucky you are to be alive right now.Un premier souffle. Une première nuit. Des jours et des années qui s'enfuient. Perdues, à jamais dans l'oublie, tu tournes, tu vires et jamais ne faiblis.
Comme beaucoup de Minks, tu n'as pas vu le jour sur Zou
On t'as souvent raconté cette histoire, songe tissé à partir d'un fragment de mémoire. On te parlait constamment d'une île; et quelle île ! C'était avec ce souvenir dépeint de mille mots que tu pouvais, la nuit, te bercer de beaux tableaux. Il s’agissait là d'une ville, là-haut, sur le dos d'un éléphant géant qui marche et qui jamais ne s’arrête. Ce n'était pas une grande ville, juste des maisons agrippées sur la peau rugueuse de la bête. Quelques pustules de pierres et de terres joliment décorés, en contraste avec certaines baraques rondes et pulpeuses rattachées aux arbres d'une dense et épaisse forêt. Une effluve constante de fruit dont tu ne pouvais qu'imaginer le goût parfumé cette vaste jungle. Et bien que la vie y était dure, les habitants eux, étaient dotés d'une camaraderie sans égale et d'une force respectée. Il n'y avait pas plus beau pays...
Il devait y faire bon vivre... sur Zou. •••
Les jours se ressemblaient, s'entassaient les uns sur les autres, un peu comme le bétail que vous étiez. Tu peux facilement résumer cette partie de ta vie par des glapissements roques et des feulements faussement satisfaits. Tous feintaient une douleur au cœur plus grande encore que celle du corps. Ce n'étaient que des sons, des mélodies équivoques et singulières qui pourtant exposées là toute la grossièreté de ce commerce, de cette élevage surement illégale. Tu étais le produit d'une union... que dis-je, d'un accouplement forcé. Au vue de l'âge de ta génitrice, tu savais... que tu n'étais pas la première et que peut-être, toi aussi, tu devrais endosser ce rôle malsain et déroutant de procréatrice pour le bien financier d'un homme aux sombres desseins.
Par chance, ton destin en avait décidé autrement.
Un soir où il faisait si froid que le bout de tes griffes gelées; là-haut, dans un ciel voilé de barres de fer, traversés des nuages menaçants, laissant par moment entrevoir une lune pleine et glaciale. Contre ton dos, tu sentais les barreaux couvert de rouilles, humides et gras, auxquelles s'étaient agrippés des doigts crispés. Ceux de ta mère. Car tout dans cette nuit unique n'était devenue que violence, flammes, hurlements, choc d'armes et cavalcades éperdues.
▬ Ne le laissez pas s'approcher des cages !Une voix d'homme que tu ne connaissais que trop bien explosa dans ce vacarme. Quelque part dans les ténèbres de la nuit, il beuglait tout ce qu'il avait de saoul pour tenter de sauver ses marchandises. Un peu plus loin, il y eut un grand remue-ménage, celui de corps qu'on aurait démantibulés dans un concert de vociférations et de cris de bataille se brisant en écume sanglante.
Là-dessus, renvoyant tout le reste au rang de vulgaires anecdotes, roula un son colossal, un grondement venu d'outre tombe, quasiment écorché. Il fit frémir les barreaux où étaient poser ton dos, forçant ton corps a vibrer de cette même trouille dévorante. Tu ne voyais pas cette chose, ni même ne savais où elle se trouvait, mais tu éprouvais une angoisse, un étrange frisson, comme on en ressent lorsqu'on est repris d'une peur ancienne dont on s'était pourtant défait. Tu avais l'impression qu'il était juste derrière toi, créant avec sa seule présence une couche de fraîcheur mortelle, comme si quelqu'un avait poussée une porte donnant sur une tempête de neige. Tout comme toi, ta mère et les autres Minks enchaînés frissonnaient d’effroi.
▬ Rien ne l’arrête, ni les balles, ni les épées, ni les lances... C'est un monstre ! Un démon !▬ Bordel de merde, mais reformez les rangs ! Il ne doit pas atteindre la marchandise! Vous m'entendez ! Si il ne vous tue pas, soyez en sûr, c'est moi qui le ferait !Toi, petit chaton, tu étais recroquevillée contre le froid des barreaux, te ratatinant un peu plus et fermant les yeux, alors qu'un nouveau concert de bruits et de clameurs abominables venait craquer, grincer, rebondir et ruisseler sur le sol jusque dans tes oreilles. Le fer frappait, les tires fulguraient en vain, se brisaient dans d'horribles grincements comme de vulgaire noix. Puis vinrent les autres sons, pire encore, plus humides, Gargouillis, râles, et déchirements. Il y avait comme un bruit de mâchoire et sous l'effet de la lune, tu pouvais sentir l'ombre des combats suinter tes bras, tes jambes au travers du corps terrorisé de la Mink qui te servait de mère. Ça claquait sévère, rythmant l’œuvre d'une Faucheuse affamée, moissonnant vie à chaque coup. Les appels se firent alors plaintes, puis se turent, un à un, sur un dernier craquement que tu n'oublieras jamais.
Quand les odieux échos de mastications se furent éteints, dans les hangars à plafonds ouvert, le tout rendu au silence, tu osas enfin ouvrir les yeux... et le regrettas aussitôt.
C'était un mink... et un crocodile à la fois. Du premier, il avait la posture, les vetements, un long chapeau blanc, debout et deux bras puissants aux mimines griffues; du second, les écailles, écarlates et sombres et une queue robuste, en cuir vert taché de vermillon. Quant à sa tête, toute penchée qu'elle été, tu ne voulais ni la voir ni la comprendre... et pourtant s'offrait devant tes mirettes larmoyantes une rangée de dents plus rouge que blanches. Tu n'avais qu'une envie, refermer les yeux pour ne plus les rouvrir mais la trouille dérobée toute chance de fuite... De plus, tu semblais être autant obnubilée que terrifiée devant cette trogne capable de te gober toute crue. Tu captas alors son regard, aussi jaunes et brûlants que le soleil, un peu venimeux. Mais il y avait aussi autre chose, un reflet d'humanité coupable qui rendait ce regard plus terrible et tragique à la fois. Une lueur de honte, de souffrance et de remords, une douleur tout a fait humaine. Étrangement émue, tu crues voir une larme se dérober de l'un de ses yeux ardent et se perdre dans un creux d'écaille. Sans que tu ne saches pourquoi, cette larme te bouleversa plus que tout le reste.
Larme de crocodile.C'est alors que des bras doux, presque oubliés, ceux de ta mère se refermèrent sur toi, et d'une voix brisée de peur, elle supplia la bête :
▬ Si vous voulez manger quelqu'un, mangez la elle ! On te souleva vers le monstre et tu pus sentir son haleine courir sur ton poil et te réchauffer. Les griffes de ta mère s'enfoncèrent dans tes flancs et a ton tour, des larmes se mirent a ruisseler pour finir absorber par ta fourrure épaissie par le froid.
Ce fut le déclic. Alors que de ta petite gueule s’extirpait des gémissements douloureux, l'être mi-mink mi-crocodile alla claquer sa mâchoire sur le corps frêle de ta mère. Il n'y eu qu'un bruit... et quel bruit...un craquement sourd, celui d'une vie qui se brise. Il s'était tordu de telle façon que son épaule la plus haute formait dés a présent un parfait angle droit. La trouille te liquéfiait presque la figure, tellement intense qu'elle en devint contagieuse et était lisible sur toute les autres frimousses enfermées en cage. Tu sentis alors soudainement ton poil hérisser quand l’énorme patte du reptile vint te saisir les deux bras. Si il y avait mit un peu plus de force, sans doute aurait-il réduit tes petits os à l'état de poussières.
▬ Infecte, autant en gout qu'en personnalité, urgh. Dommage pour un minois si bien conservée. Laissa-t-il glisser entre ses crocs rougis d’hémoglobine. Il se racla ensuite la gorge avant de cracher un restant de ce qui, quelque seconde plus tôt, était encore ta mère. L'instant d'après, dans des craquements d'os tantôt déroutant, tantôt fascinant, il reprit forme mink, débarbouillant sa gueule de son autre bras.
A le voir ainsi, un peu moins croco, te tenant par les poignet d'une seule main, petit doigt levé, le visage en grimace et l’œil perçant, on l'aurait plutôt cru tout en noblesse qu'en "brigand" ravageur. Évidement ses atours tachetés de sangs n'aidaient pas et pourtant, il avait belle prestance, dans sa lourde robe blanche sobrement rehaussée d'argent. Il n'était pas de ces petits nabots de nobliaux en peine de montrer leur fortune à leurs ribauds. Lui n'avait pas besoin de tels artifices. Il suffisait qu'il paraisse pour que tout un chacun courbe l’échine en claquant des dents.
- Spoiler:
"CROCODILE" DANDY
Partout en East Blue, on le savait le maître des crocs et ça lui suffisait. Tout ce qui comptait a ses yeux été d'empêcher la propagation des cargaisons et les élevages de Minks en route pour l'archipel des Sabaody. Cargaisons souvent tamponnées d'un joli sigle appartenant aux Tenryobito.
▬ Je suis là pour vous liberer-gara ! Ses yeux glissèrent sur la dépouille de la vieille mink... un hoquetet presque gêné s'extirpa de ses lèvres.
Urgh. J'aurais peut-être dut le dire avant...gara Ce àquoi il haussa les épaules avant de te soulever jusqu’à hauteur de museau.
▬ Déso' pour ta daronne chaton, mais elle a quand même voulu que j'te croque le lard-gara. Pas vraiment le modèle d'une bonne mamou. Par chez moi un mink responsable ne balance pas son gosse dans la gueule de l'ennemi. J'dis ça-gara, j'dis rien.Il planta alors son regard dans le tien. Une étincelle, quelque chose d'insondable, d'innommable explosa dans ta poitrine. Aussi étrange était ta relation avec ta mère, un sentiment vague mais puissant te saisie gorge et muscles, finissant de paralyser tes membres déjà en proie au froid.
A dire vrai, encore aujourd'hui, tu ignores la véritable raison du pourquoi du comment tu t'es mise a pleurer cette nuit là.
Tristesse ? Délivrance ? Empathie ? Peur ? Un mystère qui d'après Dandy, n'était pas prêt d'être résolu.
En tout cas, la suite de cette nuit, tu n'en as pas le moindre souvenir. Inévitablement, après avoir été témoin d'un tel carnage, tu perdis connaissance et te laissas voguer dans les tréfonds de ton subconscient. C'est là que tu rêvas pour la toute première fois. Comme si la venue de Dandy avait été la clé des cadenas qui retenaient prisonnier tes pensées les plus folles, comme si sa présence seule suffisait a te faire grandir et vivre, tu parcourus plaines et océans à dos de poissons volants et autres merveilles de ton imagination. Quand les chaînes cédèrent, se disloquèrent les unes des autres, une nouvelle facette de toi prit place ; la curiosité. Et chacun des jours qui suivirent cette sanglante nuit, tu te sentais renaître et progresser comme jamais depuis ces cinq dernières années.
•••
▬ Ce n'est pas comme ça que je t'ai appris a te tenir Celty-gara !Avec une règle en métal, le Mink en costume te donna une tapette sur le bout des doigts. Un couinement meurtrie comme seul brise silence et le cour repris. Une larmichette de douleur se forma en coin d’œil mais ça ne prenait pas avec Dandy, c'était lui le roi de la larme.
Cela faisait maintenant quelques années que "Crocodile" Dandy t'avais pris sous son aile. Beaucoup était tenter de dire que tu étais un peu son élève, son apprentie, son assistante ou encore sa secrétaire. Mais dans les faits, et pour l'avoir entendu de la gueule même du concerné, le mink te considérait d'avantage comme sa fille que comme une larbin. A l’époque, et peut-être encore aujourd'hui, tu n'oses pas en sourire, par fierté, mais au fond, ça te réchauffait le cœur de le savoir aussi attentionné avec toi.
C'est lui qui t'enseigna l'alphabet et les mathématiques. C'est lui qui t’inculqua de jolis pas de danses et l'importance d'un dos bien droit. Et c'est encore lui qui te donna des notions en bien et en mal. Tu lui dois beaucoup.
Tu te souviens de ses yeux, de ses regards, de ses sourires. Des sourires fichus, attendris, faibles et dans un sens amoureux. "Fierté" n'est pas le mot qu'il utiliserait pour te décrire, c'est quelque chose de plus fort, de plus grand. Quelque chose qu'on ne peut pas justifier, qu'on ne peut comprendre avec de simples mots. Et il continuait de sourire. Lui qui pourtant se croyait si brillant, si intelligent, il se sentait toujours bête quand il te regardait, quand il t’apprenait à lire, à écrire et à te battre. Un peu gaga, un peu trop papa. Il s'était promis cette nuit là, d'être là, de faire ce qu'il faut. Mille erreurs ont été commises, mais qu'importe.
Il était là pour toi.•••
▬ Eh ? Comment ça ?! Sourcils froncés de confusion et de frustration, tu croises les bras sous ta poitrine, feintant un grognement se voulant "dangereux".
Ils avaient beau sortir de ton joli minois, ces mots-là, ils n'avaient pourtant rien de doux ou de rieurs. C'étaient des batailleurs, des qui partent en guerre. Et toi qui les jetais ainsi, ces brassées de syllabes emportées, faisais les cent pas sur le navire où tu créchais depuis des années. Autour de ton visage, flambée de colère, tes cheveux crépitaient en mèches querelleuses. T'as vingt ans. T'as fini de grandir mais pas de gueuler.
▬ Tu veux partir avec eux ?! Mais... mais...Et nous ? Et moi ?u.c